Un chauffeur UBER dispose d’un statut de salarié

2019-05-06T17:49:02+02:006 mai 2019|

Après l’URSSAF, qui a reconnu le statut de salarié aux chauffeurs UBER (voir notre article du 18 mai 2016 « les chauffeurs d’UBER sont des salariés pour l’URSSAF »), la Cour d’appel de Paris a reconnu, elle aussi, ce statut (CA PARIS, Pôle 6, Chambre 2, 10 janvier 2019, n°18-08357).

Cette décision est intervenue à la suite d’un arrêt « Take Eat Easy » rendu le 28 novembre 2018 par la Cour de Cassation. Cette dernière a requalifié à cette occasion, le contrat de prestation de services d’un livreur à vélo d’une plateforme numérique en contrat de travail.

Pour les juges d’appel, le lien de subordination caractérisant l’existence d’un contrat de travail résulte d’un faisceau d’indices, ayant permis de renverser la présomption de non salariat posée par l’article L 8221-6 du Code du travail.

Les éléments justifiant cette décision

Les juges d’appel ont constaté que le chauffeur ne bénéficiait pas des conditions de travail d’un indépendant. En effet, il n’avait pas la possibilité de :

  • constituer sa propre clientèle, interdite par la « Charte de la Communauté d’UBER » ;
  • fixer ses tarifs, lesquels étaient contractuellement établis par des algorithmes de la plateforme ;
  • déterminer les conditions d’exercice de sa prestation de transport, qui étaient centralisées par UBER.

Bien plus, le chauffeur :

  • devait suivre les instructions du GPS de l’application ;
  • était contrôlé par un système de géolocalisation. Ce dernier concerne l’acceptation des courses et génère des messages de relances. Il peut même conduire à la désactivation du compte par UBER en cas de non-réponse dans un délai donné ;
  • était soumis à un pouvoir de sanction. En effet, les chauffeurs peuvent subir « une perte définitive d’accès à l’application Uber » en cas de taux d’annulation trop élevé ou de signalements émanant des utilisateurs. « Peu important que les faits reprochés soient constitués ou que leur sanction soit proportionnée à leur commission », dans ce dernier cas.

La Cour d’appel a considéré, sur la base de ce faisceau d’indices, l’existence d’un lien de subordination et ainsi d’un contrat de travail. Elle a renvoyé l’affaire devant le Conseil de prud’hommes. Ce dernier fixera les conséquences de la rupture du contrat de travail.

UBER a annoncé son intention de se pourvoir en Cassation.

Un jugement inattendu

La solution adoptée, si elle peut apparaître classique, revêt en même temps un caractère inattendu. En effet, la plateforme n’a pas l’obligation de fournir du travail au salarié. Ce critère est pourtant essentiel dans la définition du contrat de travail.

En motivant sa décision sur le pouvoir de sanction de la plateforme à l’égard des chauffeurs, la Cour de cassation semble fermer la définition du contrat de travail. On peut se demander si cela n’est pas un appel au législateur.

La Loi AVENIR

Cette décision est aussi de nature à remettre en cause les dispositions de la Loi AVENIR.

En effet, la Loi AVENIR n°2018-771 du 5 septembre 2018 est intervenue en la matière et considère que, dès lors qu’une charte est rédigée, le lien de subordination est censé être exclu entre les chauffeurs et les plateformes.

Par application de ces dispositions légales, les plateformes ont été amenées à rédiger une charte (le projet de loi mobilité reprend ces dispositions). Cette charte contient des règles de recours, des conditions d’exercice des travailleurs, la liberté pour les travailleurs d’avoir recours à la plateforme, le respect de temps de pause, des modalités de prix décents pour le service rendu, etc.

Il s’agit d’une faculté pour les plateformes de rédiger une telle charte, qui doit ensuite être annexée au contrat commercial ou aux conditions générales de vente unissant le chauffeur à la plateforme. Dans le cadre de la loi AVENIR, si la charte est rédigée et que ses mentions sont conformes, il en résulte une présomption de non salariat.

Le recours à la rédaction d’une charte peut ainsi permettre de sécuriser la relation entre les chauffeurs et les plateformes. Toutefois, elle ne saurait exclure une éventuelle requalification de la relation commerciale en contrat de travail, au regard de l’appréciation souveraine des juges du fond, qui peuvent s’en affranchir.

 

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