Congés payés et arrêt maladie : des rappels et des précisions, vers de nouvelles questions ?

2025-10-07T16:52:11+02:007 octobre 2025|

Un important revirement jurisprudentiel en matière de congés payés et arrêt maladie a été opéré par la Cour de cassation le 13 septembre 2023, suivi d’une réforme législative le 22 avril 2024. L’arrêt du 2 octobre 2024 en illustre les effets.

Une salariée, en poste depuis 2006, a connu plusieurs arrêts maladies : un pour maladie non professionnelle en 2014, un pour accident du travail jusqu’en 2016, puis un autre pour maladie non professionnelle jusqu’en 2019. Elle conteste une décision de la cour d’appel de Bourges du 18 novembre 2022 lui refusant des indemnités de congés payés liées à des périodes d’arrêt maladie.

Avant la réforme, le Code du travail limitait l’acquisition de congés payés à un an d’arrêt pour accident du travail ou maladie professionnelle, et excluait l’acquisition de congés pendant une maladie non professionnelle. Ces dispositions—au croisement des congés payés et arrêt maladie—ont été contestées pour inconstitutionnalité, mais validées par le Conseil constitutionnel le 8 février 2024.

La Cour de cassation a ensuite abordé plusieurs questions de droit, notamment la conformité des règles françaises avec la directive 2003/88/CE et la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne. Elle a refusé de transmettre une question préjudicielle à la CJUE, estimant que la législation française était clairement incompatible avec le droit européen en matière de congés payés et arrêt maladie.
La loi du 22 avril 2024 introduit une rétroactivité partielle à compter du 1er décembre 2009. Elle prévoit l’acquisition de congés pendant la maladie non professionnelle, le report des congés et certaines obligations d’information. Toutefois, la suppression de la limite d’un an pour les arrêts pour maladie professionnelle ou accident du travail n’est pas rétroactive.

La Cour de cassation a jugé que cette loi nouvelle ne pouvait pas s’appliquer à la décision de 2022, car elle n’était pas en vigueur à cette date. Elle rappelle que son rôle est de juger les décisions rendues, et non de réévaluer les litiges au fond à la lumière de la loi nouvelle.
Elle a donc confirmé sa position de septembre 2023, selon laquelle les salariés peuvent acquérir des congés payés pendant toute la durée d’un arrêt de travail, y compris au-delà d’un an, en cas de maladie professionnelle ou d’accident du travail—confirmation essentielle pour l’articulation des congés payés et arrêt maladie.

La Cour a également précisé que, bien qu’elle ne puisse appliquer la nouvelle loi dans ce litige, la cour d’appel de renvoi devra le faire. Ce rappel vise à souligner les limites de la rétroactivité prévue par la réforme.

S’agissant de l’Union européenne, la Cour a rejeté la demande de question préjudicielle, car le droit européen ne permet pas de limiter l’acquisition des congés dans la période de référence, même si un report peut être limité.

Enfin, elle a admis un argument nouveau fondé sur l’article 31, § 2, de la Charte des droits fondamentaux de l’UE. Selon elle, ce texte, invocable directement, permet de laisser inappliquée une règle nationale contraire au droit européen, ce qui est le cas de la limite d’un an fixée par l’ancien article L. 3141-5 du Code du travail.

La cassation avec renvoi impose à la cour d’appel de rejuger l’affaire en appliquant la loi dans sa nouvelle version, tout en examinant si l’absence de rétroactivité de certaines dispositions est elle-même conforme au droit européen.

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