Salaire et rémunération

Définition du salaire

Le salaire est traditionnellement défini comme la contrepartie du travail fourni, il s’agit de la rémunération qui trouve sa cause dans un contrat de travail et dans l’existence d’un lien de subordination. Le salaire désigne alors le coût du travail pour l’employeur. Il est fixé librement entre l’employeur et le salarié ou unilatéralement par l’employeur selon les usages ou convention et accords collectifs. Il peut être fixé selon la durée de travail effectif, le rendement ou au forfait.

Définition de la rémunération

A l’inverse, la rémunération est une notion plus globale incluant toutes les sommes liées à l’accomplissement d’un travail pour le bénéfice d’autrui, c’est-à-dire le salaire de base, les compléments de salaires (congés payés, prime d’ancienneté, gratifications, élément en nature…), les suppléments de salaires (mutuelle, prévoyance, chèques de transport, de vacance ou restaurant) et les éléments périphériques (intéressement, participation au bénéfice). Il peut s’agir, aussi, en dehors de tout point d’ancrage avec le contrat de travail, de la rémunération que s’octroie un indépendant.

Règles du salaire minimum interprofessionnel de croissance (SMIC)

En toute hypothèse, le salaire devra respecter les règles du salaire minimum interprofessionnel de croissance (SMIC), des salaires minimums édictés par des conventions ou accords collectifs, de la mensualisation, de la non-discrimination et de l’égalité entre homme et femme.

Par ailleurs, le salaire constituant un élément essentiel du contrat, il ne peut en principe être modifié unilatéralement par l’employeur. Cependant, le refus de cette modification pourra tout de même entrainer le licenciement d’un salarié si la décision de maintenir la modification du salaire par l’employeur est motivée par l’existence de difficultés économiques réelles et sérieuses. Pour ce faire, l’employeur devra notifier son intention par lettre RAR au salarié qui disposera d’un délai de réflexion de 1 mois pour donner sa réponse (Cass. Soc, 25 juin 2008, n°07-40.841).

Quel dommages-intérêts en cas de non-respect du smic ?

Dans un arrêt du 29 septembre 2021 (Cass. Soc., 29 septembre 2021 n°20-10.634), la Cour de cassation a statué sur le fait qu’en cas de non-respect du SMIC par l’employeur, le salarié peut obtenir une indemnisation compensatoire s’il prouve la mauvaise foi de l’employeur.

 

Des sanctions pénales et civiles en cas de non-respect du SMIC

En cas de non-respect du SMIC, l’employeur est passible d’une amende pour les contraventions de 5ème classe (soit 1 500 euros) pour chaque salarié concerné. Cependant, si l’infraction est récidivée dans un délai d’un an, l’amende est augmentée à 3000 euros (C.Trav., art. R3233-1).

Selon l’article 1231-6 du Code civil, le créancier auquel son débiteur en retard a causé, par sa mauvaise foi, un préjudice indépendant de ce retard peut obtenir des dommages-intérêts distincts des intérêts moratoires de la créance.

Par application de ces dispositions, les employeurs qui ne respectent pas l’obligation légale de paiement du salaire minimum peuvent être condamnés à verser à leurs salariés des dommages-intérêts distincts des intérêts de retard, sous réserve que ces derniers prouvent non seulement le préjudice subi en raison du non-respect du SMIC, mais aussi la mauvaise foi de leur employeur.

 

Vous avez des questions sur vos conditions de rémunération ? N’attendez pas pour prendre rendez-vous avec un avocat spécialiste du droit du travail. Nous vous accueillerons dans notre cabinet de Nice.

 

Poursuivez votre lecture sur le non-respect du SMIC et les règles de rémunération

La transaction conclue en cours d’exécution du contrat n’éteint pas les litiges postérieurs

La renonciation du salarié à ses droits nés ou à naître et à toute instance relative à l’exécution du contrat de travail ne rend pas irrecevable une demande portant sur des faits survenus pendant la période d’exécution du contrat de travail postérieure à la transaction (Cass. soc., 16 octobre 2019, n° 18-18.287).

À la suite d’un différend portant sur sa classification indiciaire, un salarié a conclu fin 2007 avec son employeur une transaction prévoyant le versement d’un rappel de salaire et le classement du salarié à un nouveau coefficient. L’exécution du contrat de travail s’est poursuivie par la suite.
Plusieurs années après, le salarié a réclamé devant les juridictions prud’homales le paiement de diverses sommes au titre d’une discrimination salariale, notamment le paiement d’un différentiel de salaire à compter de mai 2008.

La Cour d’appel a rejeté les demandes du salarié. Pour elle, si l’objet originel du litige éteint par la transaction est distinct des demandes actuelles du salarié, la transaction a un objet plus large que les simples demandes originelles du salarié. Ce dernier a en effet renoncé aux droits nés ou à naître et à toute instance relative à l’exécution du contrat de travail.

Les juges du fond en déduisent que les demandes de reconnaissance et d’indemnisation de la discrimination salariale, afférentes à l’exécution du contrat de travail, sont couvertes par les renonciations stipulées dans la transaction. Pour justifier cette décision, la Cour d’appel fait expressément référence à l’évolution de la doctrine de la chambre sociale de la Cour de cassation sur les effets de la transaction.

La décision des juges du fond est cassée. Pour la chambre sociale de la Cour de cassation, la renonciation du salarié à ses droits nés ou à naître et à toute instance relative à l’exécution du contrat de travail ne rend pas irrecevable une demande portant sur des faits survenus pendant la période d’exécution du contrat de travail postérieure à la transaction et dont le fondement est né postérieurement à la transaction.

Cette solution est à rapprocher de celle déjà admise pour les transactions conclues en cours d’instance judiciaire. Pour la chambre sociale, si la transaction conclue en cours d’instance produit les mêmes effets qu’un jugement sur le fond pour l’application de la règle de l’unicité de l’instance, elle n’interdit toutefois pas d’engager par la suite une nouvelle procédure portant sur des prétentions dont le fondement est né ou s’est révélé postérieurement à la transaction (Cass. soc., 13 juin 2012, n° 10-26.857  ; Cass. soc., 20 février 2019, n° 17-21.626).

La règle d’unicité de l’instance n’est plus une cause d’irrecevabilité de l’action en matière prud’homale depuis le 1er août 2016. Depuis cette date, il est possible de présenter des demandes additionnelles si elles se rattachent aux prétentions originaires par un lien suffisant (CPC art. 70). Une demande ne répondant pas aux conditions de recevabilité peut également faire l’objet d’une autre instance, sous réserve des règles de prescription.

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Accepter des cadeaux d’affaires d’un montant important peut justifier un licenciement pour faute grave

Dans le but de prévenir les faits délictueux liés à d’éventuels conflits d’intérêts, nombre d’entreprises ont pris l’habitude de réglementer les relations de leurs salariés avec les clients, fournisseurs et prestataires.

C’est dans ce cadre, par exemple, que les salariés se voient interdire de solliciter ou de recevoir des cadeaux d’affaires dans le cadre de leur activité.

La violation de cette interdiction constitue une faute exposant les intéressés à une sanction pouvant aller jusqu’au licenciement.

Exemple de cas de licenciement pour faute grave

Un employé de banque a été licencié pour faute pour avoir accepté à plusieurs reprises des dons d’argent de la part d’une cliente. Pour considérer le licenciement sans cause réelle et sérieuse, la Cour d’appel avait estimé que les dispositions du règlement intérieur de la banque n’interdisaient pas à ses salariés de recevoir des cadeaux ne s’écartant pas des usages normaux, auxquels elle rapprochait les pratiques litigieuses.

La Cour de cassation a censuré la décision pour dénaturation en indiquant que les dispositions du règlement intérieur, considérées dans leur ensemble, excluaient qu’un don de somme d’argent, quel que soit son montant et quelles que soient les circonstances dans lesquelles il était accordé, puisse être considéré comme un cadeau ne s’écartant pas des usages normaux (Soc. 29 sept. 2010, n° 09-42.459).

Plusieurs décisions montrent, cependant, que l’édiction d’une telle règle n’est pas indispensable pour fonder le licenciement d’un salarié ayant profité des largesses de la clientèle.

Le simple fait que le salarié accepte ou demande un cadeau peut être vu comme un comportement inadapté et donc fautif. (Soc. 26 mars 2014, n° 12-28.427 : en l’espèce, l’inspection du travail avait autorisé le licenciement d’un salarié protégé fondé sur le fait, non d’avoir accepté un cadeau, mais d’en avoir sollicité un auprès d’un fournisseur).

La Cour d’appel d’Angers a estimé (CA Angers, 29 mai 2020, n°18-00395, Sté Howmet Ciral c/ M) que le licenciement pour faute grave était parfaitement justifié à l’égard d’un salarié ayant manqué à son obligation de loyauté en acceptant personnellement des cadeaux d’un montant important d’un fournisseur à deux reprises. Ceci avait par ailleurs été fait en toute discrétion, en dépit des exigences d’intégrité en vigueur au sein de la société dont il avait parfaitement connaissance.

Ce salarié s’était vu proposer comme cadeaux de la part d’un fournisseur deux tablettes numériques d’une valeur de 798 euros.

Il les avait acceptées, sans en référer à son responsable alors que la réglementation interne ne lui permettait d’accepter que des cadeaux de « valeur raisonnable », c’est-à-dire autour de 20 euros, et lui enjoignait d’interroger son responsable en cas de doute.

Il a agi en totale discrétion en demandant expressément à ce que les cadeaux lui soient livrés à son domicile. Mais les faits ont été découverts de façon fortuite par l’employeur et le salarié a été convoqué à un entretien préalable. À cette occasion, il a avoué avoir commandé et reçu par le passé à son domicile une tablette numérique d’une valeur de 159 euros du même fournisseur sans en informer sa hiérarchie. Ces manquements graves, répétés et délibérés ont conduit l’employeur à le licencier pour faute grave.

Pour la Cour d’appel d’Angers, le salarié a causé un préjudice à l’entreprise (image ternie, risque de redressement Urssaf eu égard à l’avantage en nature indûment octroyé, etc.).

Le salarié a tenté, sans succès, de minimiser la gravité de sa faute en faisant valoir plusieurs circonstances atténuantes (absence d’antécédents disciplinaires, ancienneté et non-réception des deux dernières tablettes).

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La Cour de Cassation assouplit au bénéfice du salarié la charge de la preuve des heures supplémentaires réalisées

Par un arrêt du 18 mars 2020, n°18-10919, la Cour de Cassation vient aménager la charge de la preuve pesant sur le salarié pour le paiement par son employeur de ses heures supplémentaires.

Un bref rappel de l’état du droit antérieur concernant la charge de la preuve des heures supplémentaires s’avère des plus utile (I) ainsi que l’influence de la décision de la Cour de Justice Européenne du 14 mai 2019 (II) pour percevoir les atouts de la décision finalement retenue par la Cour de Cassation (III).

 

Etat des textes et de la jurisprudence antérieure sur les heures supplémentaires

Depuis toujours, il me semble qu’il existe un paradoxe concernant le décompte des heures supplémentaires. En effet, d’une part, le Code du Travail impose à l’employeur le décompte des heures réalisées par le salarié lorsque ce dernier n’effectue pas un horaire collectif de travail [L 3171-2 C. Trav.] et impose à l’employeur de tenir à disposition de l’inspecteur du travail le décompte des heures effectuées par ses salariés [L 3171-3 C. Trav.].

D’autre part, le Code du Travail indique qu’en cas de litige concernant la demande de paiement des heures supplémentaires par le salarié devant le conseil des prud’hommes : la charge de la preuve est partagée entre l’employeur et le salarié [L. 3171-4 C. Trav.].

Or, comme le note d’ailleurs, la Cour de Cassation elle-même dans sa note explicative accompagnant sa décision du 18 mars 2020, les litiges concernant les heures supplémentaires font l’objet « d’un abondant contentieux ». Comment cela est-il possible ?

Dès lors que l’employeur a une obligation légale d’enregistrer quotidiennement et de manière fiable le temps de travail : les litiges devraient être rares. Dans les faits, cela est rendu possible par une violation courante du Code du Travail par de nombreux employeurs. Cette violation est manifestement tolérée puisqu’il est communément plaidé et admis devant les Conseils des prud’hommes que les TPE/PME (soit 50 % des employeurs en France) devraient faire l’objet d’une certaine tolérance à cet égard car cette mesure serait trop contraignante à mettre en place.

Pour répondre à cette contradiction, la Cour de Cassation avait aménagé la charge de la preuve du salarié en se fondant à la fois sur le principe énoncé à [art. 6 CPC] (la charge de la preuve pèse sur le demandeur) et l’article L. 3171-4 du Code du travail.

Ainsi en 2004, la Cour de Cassation jugeait que la charge de la preuve des heures supplémentaires n’incombait à aucune des parties mais qu’il appartenait tout de même au salarié d’apporter préalablement au juge des éléments de nature à étayer sa demande [Cass. Soc., 25/02/2004, n°01-45.441].

En 2010, la Cour précise la méthodologie que doivent respecter les juridictions dans leur appréciation des heures supplémentaires : le salarié doit apporter des éléments de nature à étayer sa demande. Ces éléments doivent être suffisamment précis pour que l’employeur puisse y répondre en apportant ses propres éléments de preuve [Cass. Soc., 24/11/2010, n°09-40.928]. La Cour jugeait dans ce même arrêt qu’un décompte mensuel établi au crayon par la salariée de ses heures supplémentaires réalisées était un élément assez précis auquel l’employeur pouvait répondre. La jurisprudence de la Cour de Cassation s’est ensuite appliquée à préciser ce qui était de nature à « étayer » de manière précise ou non la demande du salarié.

 

Elle jugera ainsi suffisant :

  • La production de décomptes précis des heures réalisées, en l’occurrence un décompte forfaitaire de 5 heures supplémentaires par jour [Cass. Soc., 3/07/2013, n°12-17.594] ;
  • Des relevés quotidiens du temps de travail identiques pour chaque jour (8H00-12H00/ 14H00/18H00) [Cass. Soc., 19/06/2013, n°11-27.709] ;
  • Ou encore un tableau de décomptes des heures supplémentaires réalisées sans décompte quotidien et établi à posteriori par le salarié [Cass. Soc., 24/11/2014,n°12-24.858] ;

 

La Cour de Cassation était donc déjà assez libérale dans son appréciation des éléments à apporter par le salarié pour prouver la réalisation des heures supplémentaires : par sa décision du 18 mars 2020 elle va aller encore plus loin sur cette voie.

 

L’influence de la décision de La Cour de Justice Européenne du 14 mai 2019

Dans sa décision du 18 mars 2020, avant de modifier, légèrement, sa jurisprudence sur les heures supplémentaires. En effet, la Cour de Cassation va viser pour la première fois dans une telle décision non plus seulement l’article L. 3171-4 du Code du Travail qui se rapporte à la répartition de la charge de la preuve des heures supplémentaires devant le juge, mais également les articles L. 3171-2 du Code du Travail, L. 3171-3 du Code du Travail qui se rapportent à l’obligation de l’employeur d’enregistrer le temps de travail du salarié.

La Cour de Cassation entend ainsi rappeler que l’employeur a une obligation d’enregistrement du temps de travail. On peut comprendre que la Cour nous indique en sous-texte que si cette obligation de l’employeur était respectée elle ne croulerait pas sous ce qu’elle qualifie elle-même d’ « abondant contentieux ». La Cour nous précise dans sa note explicative que le rappel qu’elle fait sur l’obligation d’enregistrement du temps de travail par l’employeur lui a été inspirée par la Cour de Justice Européenne (CJE) dans sa décision du 14 mai 2019, C-55/18.

Dans cette décision, qui concernait l’Espagne, la CJE combine l’application de plusieurs dispositions du droit de l’Union Européenne pour juger que ce dernier impose aux Etats de mettre en place une législation qui oblige aux employeurs d’enregistrer le temps de travail des salariés. La CJE se fonde notamment sur les obligations relatives à la durée maximum de travail hebdomadaire et à un repos minimum quotidien fixé par la Directive 2003/88 CE du 4 novembre 2003 concernant certains aspects de l’aménagement du temps de travail ainsi que sur qui prévoit que : « Tout travailleur a droit à une limitation de la durée maximale du travail et à des périodes de repos journalier et hebdomadaire, ainsi qu’à une période annuelle de congés payés ».

La CJE indique, à juste titre, que seul « un système permettant de mesurer le temps de travail journalier effectué par chaque travailleur » permet un contrôle du respect des droits du salarié à cet égard et donc l’effectivité de ses droits.

La CJE précise ensuite que le salarié « doit être considéré comme la partie faible dans la relation de travail ». Ainsi, il est très compliqué pour le salarié d’enregistrer lui-même son propre temps de travail et l’employeur ne doit pas être en mesure de le priver de l’effectivité de ses droits grâce à sa position dominante.

La CJE en déduit qu’il appartient donc à l’employeur d’enregistrer le temps de travail et donc aux Etat membres d’imposer aux employeurs de mettre en place un système d’enregistrement du temps de travail.

Se fondant sur cette décision, la Cour de Cassation, prend acte de l’obligation générale et renforcée par cette décision de la CJE de l’employeur d’enregistrer le temps de travail de ses salariés de manière quotidienne.

La Cour de Cassation semble ensuite appliquer un système de vase communiquant : si l’employeur à une obligation renforcée d’enregistrer le temps de travail car cette obligation découle directement de la Charte des Droits de l’Union Européenne, l’obligation du salarié à ce même égard doit être allégée.

C’est ainsi que va procéder la Cour de Cassation en allégeant encore ses exigences à l’égard du salarié pour démontrer la réalisation des heures supplémentaires dont il demande le paiement et en rappelant que de son côté l’employeur à une obligation « d’assurer le contrôle des heures effectuées ».

 

Abandon de la notion d’étaiement

Dans le cas jugé par la Cour de Cassation, une situation très classique se présentait :

  • L’employeur n’avait pas, contrairement à son obligation légale, enregistré le temps de travail de son salarié ;
  • Ledit salarié présentait pour le paiement de ses heures supplémentaires des tableaux de décomptes des heures effectuées, tableaux qu’il avait établis lui-même ;

 

La Cour d’Appel avait rejeté la demande du salarié en paiement de ses heures supplémentaires. Elle retenait pour cela l’argumentation, classique, de l’employeur qui n’avait pas produit d’élément de preuve propre mais qui se contentait de critiquer les éléments de preuves apportés par le salarié.

En effet, dans le cas d’espèce, le salarié avait apporté des éléments à l’appui de ses demandes qui semblaient invraisemblables ou qui se contredisaient entre eux. Il avait ainsi produit des tableaux de décomptes différents en première instance et en appel, et ces mêmes tableaux se contredisaient parfois avec d’autres preuves qu’il avait lui-même apportées tels que des billets d’avion ou de train.

La Cour ne remet pas en cause l’incohérence des pièces produites par le salarié mais casse néanmoins le raisonnement de la Cour d’Appel. Elle impose alors sa nouvelle formule concernant le paiement des heures supplémentaires : « Il appartient au salarié de présenter, à l’appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu’il prétend avoir accomplies afin de permettre à l’employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d’y répondre utilement en produisant ses propres éléments. »

Il ressort de cette formulation que l’obligation pour le salarié d’apporter des éléments permettant « d’étayer » sa demande a été supprimée. Dans sa note explicative, la Cour de Cassation nous indique que la notion d’étaiement maintenait une confusion avec la notion de preuve, et était, d’après elle, probablement mal comprise des juges du fond qui avaient tendance à interpréter la notion d’étaiement comme une charge de la preuve pesant sur le seul salarié.

Elle y préfèrera dorénavant la notion simple d’une production « d’élément à l’appui de sa demande » suffisamment précis pour que l’employeur puisse répondre en produisant ses propres éléments de preuves.

Ce que la Cour précise une nouvelle fois c’est que l’employeur ne peut pas se contenter de souligner les incohérences ou invraisemblances des éléments produits par le salarié pour contrecarrer sa demande de paiement d’heures supplémentaires. Ces preuves suffisent à appuyer la demande du salarié en paiement de ses heures supplémentaires.

L’employeur doit donc impérativement produire ses propres éléments de preuve en réponse : à défaut il doit être condamné. Et pour cause, l’employeur devrait avoir en sa possession des éléments de preuve pertinents en réponse. En effet, comme le rappelle à deux reprises la Cour de Cassation dans son considérant de principe, il a l’obligation d’enregistrer le temps de travail de son salarié : « Il appartient au salarié de présenter, à l’appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu’il prétend avoir accomplies afin de permettre à l’employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d’y répondre utilement en produisant ses propres éléments.

Le juge forme sa conviction en tenant compte de l’ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées ». La Cour précise pour finir, dans une formule qui semble peu compatible avec les exigences de motivation des décisions de justice, que le juge fixe le montant de la créance dû aux titres des heures supplémentaires qu’ : « il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul ».

Le message de la Cour de Cassation aux Cours d’Appel est ainsi très clair : elle les invite à purger elle-même les litiges relatifs aux heures supplémentaires et ce afin de tarir les pourvois en cassation de cet « abondant contentieux ».

Lire d’autres articles rédigés par Stéphanie Jourquin, avocat en droit du travail à Nice, au sujet des heures supplémentaires :

Pour rappel, les références de la décision commentée : Cour de Cassation du 18 mars 2020

SOURCES : village-justice.com

Quel délai pour réclamer des créances salariales ?

Avant la loi de 2008, la prescription des actions en paiement des créances salariales était quinquennale.

Sauf report exceptionnel, il n’était pas possible, à compter de la saisine d’un juge, de remonter plus de cinq années antérieurement.

La loi de sécurisation de l’emploi de 2013 a modifié la prescription des créances salariales de trois manières

En premier lieu, la durée de la prescription passe de cinq à trois ans.

En deuxième lieu, le point de départ devient officiellement glissant. Le salarié ne peut demander, lorsque le contrat est en cours, que des sommes « dues au titre des trois dernières années ». Lorsque « le contrat de travail est rompu, les sommes dues au titre des trois années précédant la rupture du contrat ».

Il importe de distinguer les deux hypothèses :

Pendant le déroulement du contrat de travail, est-il possible de revendiquer le paiement de créances salariales au-delà des trois dernières années ?

Une interprétation textuelle de l’article L 3245-1 du Code du travail, alinéa 2 tendrait à suggérer qu’il peut remonter au-delà de trois ans :

« L’action en paiement ou en répétition du salaire se prescrit par trois ans à compter du jour où celui qui l’exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer. La demande peut porter sur les sommes dues au titre des trois dernières années à compter de ce jour ou, lorsque le contrat de travail est rompu, sur les sommes dues au titre des trois années précédant la rupture du contrat ».

L’action du salarié doit être intentée dans les trois ans à compter « du jour où il a eu connaissance du fait lui permettant d’agir » et sa demande ne peut porter que sur « les sommes dues au titre des trois dernières années à compter de ce jour ».

Dès lors, le terme « ce jour » renvoie au jour où le salarié a eu connaissance des faits.Certains auteurs en déduisent logiquement que « l’indemnisation n’est pas de trois années comme on pourrait le croire mais peut couvrir un peu moins de six années. […]

Si le salarié agit légèrement avant le terme des trois ans à compter du jour où il a connu l’existence de son droit (alinéa 1), il peut remonter trois ans en arrière, non pas à compter du jour où il introduit l’instance mais du jour où son droit lui a été révélé (alinéa 2).

Il est donc en droit de solliciter un peu moins de six années d’arriérés (trois ans entre le jour de la saisine du conseil de prud’hommes et le jour de la révélation du droit et trois ans antérieurement à la révélation du droit), si la créance continuait à courir après sa révélation.

Il est pourtant loin d’être acquis que la chambre sociale de la Cour de Cassation se fonde sur une telle interprétation, contraire à l’esprit de la loi, puisqu’elle reviendrait à allonger le délai de prescription, non de l’action, mais des créances salariales.

À la rupture du contrat de travail, les choses sont plus complexes

A priori, l’intérêt de l’instauration d’un point de départ désormais glissant est neutralisé par la prescription des sommes au-delà des « trois années précédant la rupture du contrat ».

Ainsi, un salarié, dont le contrat a été rompu, qui arriverait à établir la nécessité du report du point de départ de la prescription en raison de ce qu’il a connu au jour de la remise du solde de tout compte l’existence d’une créance ancienne, non correctement réglée, ne pourrait en demander le règlement car elle est née plus de trois ans avant la rupture du contrat de travail.

L’effet majeur du point de départ glissant est donc sérieusement contrarié, ce qui revient quasiment – le quantum de trois ans au lieu de cinq mis à part – à la situation antérieure à la loi de 2013.

Inversement, la situation pourrait parfois s’avérer plus favorable que sous l’empire de la loi antérieure. Comme l’a justement relevé Christophe Radé, « la distinction désormais opérée par l’article L 3245-1 du Code du travail entre le délai pour agir (trois ans) et la période couverte par la demande (salaires des trois années avant la rupture) est susceptible de permettre au salarié, qui agit dans la troisième année de la prescription, d’obtenir désormais plus (trois ans) qu’auparavant puisque avant 2013 le délai de cinq années partait de la saisine du juge et portait sur les cinq années antérieures ».

En effet, un salarié qui, sous l’empire du droit antérieur, agissait dans la troisième année de prescription n’aurait pu demander que des sommes portant sur les deux dernières années du contrat de travail voire presque rien s’il s’agissait au terme de la cinquième année.

Sous l’empire de la prescription actuelle, même en agissant au terme de la prescription de l’action de trois ans, il peut demander le paiement des trois dernières années, ce d’autant plus que la suppression du principe de l’unicité de l’instance n’empêche pas une action ultérieure à celle relative à la rupture du contrat de travail.

Cela fait dire à Bernard Gauriau que la rédaction « contredit […] la logique réductrice du nouveau texte ».

En dernier lieu, la prescription des créances salariales se voit explicitement porter à la fois sur l’action et sur le montant des sommes avec un délai butoir de trois années lorsque le contrat de travail a été rompu.

Source : la prescription en droit du travail. Étude d’actualité des relations individuelles de travail, Julien Icard, Professeur à l’Université polytechnique Hauts-de-France

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Fiche pratique des délais de prescription en matière sociale
Barème Macron : vers une abrogation du plafonnement des indemnités légales de licenciement ?

Comment prouver l’existence d’heures supplémentaires

Le silence du salarié qui n’a jamais réclamé de supplément de salaire au cours de son emploi ne vaut pas renonciation de sa part au paiement de ses heures supplémentaires (Cass. Soc., 26 septembre 2012, n°11-14.540).

Par un arrêt du 25 février 2004, la Chambre sociale de la Cour de Cassation, sans remettre en cause le principe selon lequel la charge de la preuve n’incombe spécialement à aucune des parties, précise les obligations à la charge du salarié en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail effectuées (Cass. Soc., 25 février 2004, n°01-45.441).

Selon la Cour de Cassation, l’employeur est tenu de fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié (article L. 3171-4 du Code du travail). Mais il appartient à ce dernier de fournir, préalablement, des éléments de nature à étayer sa demande en paiement des heures supplémentaires.

Le salarié qui réclame un rappel d’heures supplémentaires doit étayer sa demande par des éléments concrets (feuilles de temps, tickets de transport, attestations sur les horaires pratiqués par le salarié).

De surcroît, dans un arrêt rendu le 12 février 2015, la Cour de Cassation a rappelé que l’employeur doit justifier des horaires effectivement réalisés, sous peine de voir les juges retenir à bon droit l’existence d’heures supplémentaires sur la base des éléments transmis par le salarié (Cass. Soc., 12 février 2015, n°13-17.900).

Cet arrêt précise également que « l’employeur avait appelé la salariée à effectuer de multiples tâches sans procéder au moindre enregistrement de ses horaires effectués a, par là-même, caractérisé l’élément intentionnel du travail dissimulé et a fixé le montant de l’indemnité de travail dissimulé en tenant compte du mode de chiffrage des heures supplémentaires dont elle a relevé qu’il n’était pas critiqué ».

Par ailleurs, le versement de primes exceptionnelles ou de commissions ne peut tenir lieu de règlement des heures supplémentaires, peu important que le montant de ces primes corresponde à celui des heures supplémentaires effectuées (Cass. Soc., 10 octobre 2013, n°1216811).

Liste non exhaustive des éléments à réunir permettant de reconstituer ses horaires de travail

En cas de contentieux, cette liste permet de démontrer l’existence d’heures supplémentaires :

  1. Contrat de travail
  1. Bulletins de paie

Ils doivent mentionner le nombre total d’heures supplémentaires effectuées.

  1. Plannings

Plannings réalisés par les soins du salarié, de son responsable/employeur ou d’autres salariés de la société.

  1. Relevés de badges

Relevés du badge utilisé pour entrer et sortir de l’entreprise : badge du parking, badge du bâtiment de la société etc.

  1. Agendas

Réalisés par les soins du salarié.

  1. Horaires d’ouverture de la société

Disponibles par exemple : sur Internet, sur les documents de la société, sur la porte d’une boutique, etc.  

  1. Mails/messages

Fournir notamment les mails envoyés depuis le poste de travail en dehors des horaires habituels, les mails de supérieurs hiérarchiques demandant d’effectuer des heures supplémentaires ainsi que les mails d’alerte à l’employeur concernant l’importance des heures effectuées.

  1. Historique des trajets

Tous documents permettant de retracer l’historique des trajets effectués.

  • Disponible éventuellement en cas d’utilisation des services Google et Google Maps (notamment en cas de possession d’une adresse Gmail).
  1. Itinéraire Maps du domicile au lieu de travail

Atteste de la durée entre les deux emplacements.

  1. Justificatifs d’utilisation des moyens de transport pour se rendre sur le lieu de travail et durant le temps de travail

Exemples : Relevés de péage, billets de train, de bus, d’avion, tickets de métro, de tram, etc.

  • Penser aux relevés de compte bancaire en cas de perte des justificatifs.
  1. Tableau de chiffrage des heures effectuées

Il doit être précis et corroborer les autres documents fournis. 

  1. Bons d’intervention auprès des clients
  2. Notes de frais
  3. Attestations / témoignages

Attestations de collègues de travail, de personnes travaillant à proximité du lieu de travail, etc., précises et corroborant les autres documents fournis.

Les attestations / témoignages doivent impérativement être précis, exacts et non contradictoires :

  • Exactes : une personne peut rédiger un témoignage en faveur du salarié À CONDITION qu’elle ait effectivement été témoin de ce qu’elle rapporte. Par exemple, le témoignage d’une personne attestant des horaires du salarié ne peut pas être valable si ce témoin ne pouvait pas être présent du fait de ses propres horaires.
  • Précises : les attestations doivent comporter le plus de détails possibles : de telle heure à telle heure, tel jour, à tel moment de la journée, etc. Il peut parfois être possible de souligner que la charge de travail supplémentaire correspondait à un évènement particulier et dont la preuve est facilement démontrable (mise en place d’un nouveau produit, organisation d’un évènement, etc..).
  • De manière générale, les attestations et témoignages doivent être le plus détaillés possible, être exacts et corroborer les autres éléments du dossier.
  1. Fiche métier

Fiche renseignant notamment les missions demandées et donc les obligations afférentes à l’emploi occupé.

  1. Lettre RGPD
  2. Tout autre document faisant référence à vos heures de travail


Attention à :

  • Incohérences

Les pièces ne doivent pas être contradictoires entre elles.

Exemple de conséquence induite dans une décision du CPH : « Les éléments [versés au débat] sont recevables et suffisamment précis. Néanmoins, il s’avère que le tableau récapitulatif comporte des incohérences à certaines dates, de sorte que le conseil est dans l’impossibilité de vérifier avec exactitude le nombre d’heures supplémentaires réellement effectuées par rapport aux demandes chiffrées. »

  • Qualité des pièces fournies

Les pièces doivent contenir des éléments précis et vérifiables.

  • Etablissement de pièces a posteriori

Donne l’impression que les pièces ont été « détournées » pour servir les arguments.

  • Régularité des heures de travail effectuées

Apparait peu conforme à la réalité.

  • Temps de trajet habituel entre le domicile et le lieu de travail

Il n’entre pas dans le décompte des heures supplémentaires.

  • Autonomie dans l’organisation du temps de travail

Exemple de conséquence induite dans une décision du CPH : « Le salarié jouissait d’une totale liberté d’organisation de son travail ; il résulte en effet de son propre courrier qu’il avait lui-même pris la décision de venir travailler plus tôt le matin »

Voici d’autres articles rédigés par Stéphanie Jourquin, avocat en droit du travail à Nice, au sujet des heures supplémentaires :

Temps partiel: les heures excédant le 10ème ou le tiers de la durée contractuelle de travail sont majorées

Le cadre dirigeant peut-il réclamer des heures supplémentaires ?

Les nouveaux droits au chômage à compter du 1er novembre 2019

Lors d’une conférence de presse le 18 juin 2019, le gouvernement a présenté sa réforme de l’assurance chômage. Les principales mesures ont pour objet une économie de 3,4 milliards d’euros sur la période 2019-2021.

 

1/ Les entreprises qui abusent des contrats de type CDD ou intérim seront soumises à un système de bonus-malus sur les contributions d’assurance chômage. Cela a pour objectif de les inciter à proposer davantage de CDI ou à allonger la durée des CDD

Ce mécanisme s’appliquerait à compter du 1er janvier 2020 dans les entreprises de plus de 11 salariés. Les secteurs d’activité concernés sont les suivants :

  • fabrication de denrées alimentaires, de boissons et de produits à base de tabac ;
  • autres activités spécialisées, scientifiques et techniques ;
  • hébergement et restauration ;
  • production et distribution d’eau et assainissement, gestion des déchets et dépollution ;
  • transport et entreposage;
  • fabrication de produits en caoutchouc et en plastique et d’autres produits non métalliques ;
  • travail du bois, industrie du papier et imprimerie.

Après une phase d’expérimentation dans ces secteurs d’activité, le dispositif pourrait être généralisé à tous les secteurs.

Le taux des cotisations patronales d’assurance chômage actuellement de 4,05 %, variera entre 3 et 5%.

Ainsi plus le nombre de salariés s’inscrivant à pôle emploi après avoir travaillé dans l’entreprise serait important, plus celle-ci paierait de cotisations patronales à l’assurance-chômage.

À l’inverse, plus une entreprise ferait d’efforts pour réduire le nombre de personnes s’inscrivant à pôle emploi, moins elle paierait de cotisations.

 

2/ Les conditions d’ouverture des droits à chômage seront durcies

Dès le 1er novembre 2019, la durée minimale d’affiliation à l’assurance chômage permettant l’ouverture des droits sera de 6 mois d’activité appréciée sur les 24 derniers mois (au lieu de 4 mois d’activité sur les 28 derniers mois actuellement).

 

3/ Réforme assurance chômage : des allocations chômage dégressives

À compter du 1er novembre 2019, il est prévu que les demandeurs d’emploi dont le salaire de référence est supérieur à 4500 € bruts par mois voient leur indemnisation diminuée au début du 7e mois de perception d’allocations, de 30 %, avec un plancher, sans que le niveau d’indemnisation puisse être inférieur à 2261 € nets par mois.

Cette mesure ne s’appliquerait pas aux demandeurs d’emploi âgés d’au moins 57 ans.

 

4/ Au 1er avril 2020, les règles d’indemnisation du chômage seront révisées globalement pour que les allocations chômage :

  • ne puissent jamais dépasser le montant du salaire net mensuel moyen perçu par le salarié avant la période de chômage,
  • ni être inférieures à 65 % de salaire,
  • et soient calculées sur le revenu mensuel moyen du travail et non sur des jours travaillés comme aujourd’hui.

 

5/ Réforme assurance chômage : au 1er novembre 2019, la démission pour reconversion professionnelle ouvrira droit à chômage, selon les conditions suivantes :

Le salarié devra justifier de 5 années d’activité antérieure et de l’existence d’un projet professionnel. Ce droit pourrait ainsi être renouvelé tous les 5 ans, soit 8 fois sur une vie professionnelle de 40 ans.

 

6/ Les travailleurs indépendants confrontés à une liquidation judiciaire de leur entreprise pourraient percevoir à compter du 1er novembre 2019 une allocation forfaitaire mensuelle d’un montant de 800 € pendant 6 mois si leur activité a généré au moins 10 000 € de revenus par an sur les 2 années précédant la liquidation judiciaire.

L’égalité salariale entre les hommes et les femmes est une obligation de résultat et non plus une obligation de moyens

Égalité salariale homme femme : où en sommes-nous ?

Plus de 46 ans après l’inscription dans la loi du principe « à travail de valeur égale, salaire égal », les salaires des femmes sont toujours, pour le même travail, inférieurs de 9 % à ceux des hommes.

L’Index de l’égalité professionnelle va permettre de passer à une obligation de résultats en matière d’égalité salariale homme femme, et non plus simplement une obligation de moyens.

En application de la Loi AVENIR n°2018-771 du 5 septembre 2018, toute entreprise de plus de 50 salariés devra, à terme :

  • mesurer l’égalité hommes-femmes dans l’entreprise sur la base de 5 indicateurs et obtenir un score minimum de 75 points ;
  • publier chaque année ses résultats sur son site internet, dans sa BDES et les transmettre aux services du ministère du travail par télédéclaration ;
  • mettre en place les actions correctives sur 3 ans pour atteindre le score de 75 points ; à défaut, l’employeur pourra se voir appliquer une pénalité financière fixée au maximum à 1% des rémunérations et gains.

 

Égalité salariale homme femme : les indicateurs à prendre en considération

Les indicateurs à prendre en compte varient suivant que l’effectif dépasse ou non le seuil de 250 salariés.

4 indicateurs dans les entreprises de 50 à 250 salariés (article D 1142-2-1 du Code du travail) :

  1. l’écart de rémunération entre les femmes et les hommes calculé à partir de la moyenne de la rémunération des femmes comparée à celle des hommes, par tranche d’âge et par catégorie de postes équivalents,
  2. l’écart de taux d’augmentations individuelles de salaire entre les femmes et les hommes,
  3. le pourcentage de salariées ayant bénéficié d’une augmentation dans l’année suivant leur retour de congé de maternité, si des augmentations sont intervenues au cours de la période pendant laquelle le congé a été pris ;
  4. le nombre de salariés du sexe sous-représenté parmi les 10 salariés ayant perçu les plus hautes rémunérations.

5 indicateurs dans les entreprises de plus de 250 salariés (article D. 1142-2 du Code du travail) :

  1. l’écart de rémunération entre les femmes et les hommes calculé à partir de la moyenne de la rémunération des femmes comparée à celle des hommes, par tranche d’âge et par catégorie de postes équivalents,
  2. L’écart de taux d’augmentations individuelles de salaire ne correspondant pas à des promotions entre les femmes et les hommes,
  3. l’écart de taux de promotions entre les femmes et les hommes ;
  4. pourcentage de salariées ayant bénéficié d’une augmentation dans l’année suivant leur retour de congé de maternité, si des augmentations sont intervenues au cours de la période pendant laquelle le congé a été pris ;
  5. le nombre de salariés du sexe sous-représenté parmi les 10 salariés ayant perçu les plus hautes rémunérations.

Calendrier de mise en oeuvre et obligations

Le calendrier de mise en place de cette obligation a été fixé comme suit par le décret n°2019-15 du 8 janvier 2019 :

Entreprise de 1000 salariés et plus : 1er mars 2019
Entreprise de 250 à 999 salariés : 1er septembre 2019
Entreprise de 50 à 249 salariés : 1er mars 2020.

Le site du Ministère du travail met à disposition un outil pour calculer pour les entreprises de plus de 250 salariés.

L’entreprise a ensuite d’autres obligations concernant l’égalité salariale homme femme, telles que :
– Publier annuellement la note globale obtenue sur le site internet de l’entreprise ;
– Ou à défaut par tous moyens, informer le CSE sur la méthode de calcul et les résultats détaillés par intégration à la BDES ;
– Transmettre à la DIRECCTE la note
– Obtenir un minimum de 75 points.

À défaut de respecter ces obligations, l’employeur s’expose à une sanction pécuniaire correspondant à 1% des rémunérations des salariés. Toutefois, il lui est laissé la possibilité de s’expliquer sur sa carence et d’engager des actions pour tenter de réduire les écarts de rémunération sur une période de trois ans.

Vous serez peut être intéressé par les articles suivants rédigés par Stéphanie Jourquin, avocat en droit du travail à Nice :

Peut-on licencier une femme enceinte ?
Plus d’article sur le thème Salaire et Rémunération

Une transaction n’est valable qu’après la notification de licenciement au salarié

La transaction ou « protocole d’accord transactionnel » est un contrat par lequel les parties, par des concessions réciproques, mettent fin à une contestation née, ou préviennent un litige à naître (article 2044 du Code Civil).
Il est de jurisprudence constante que, pour être valable, une transaction doit être conclue après la date de rupture définitive du contrat de travail, soit postérieurement à la notification de licenciement au salarié (Cass. soc., 4 janvier 2000, n°97-41.591).

L’idée sous-jacente dans l’esprit des juges est ici de protéger le salarié, partie faible, selon eux, à la transaction. Par conséquent, par cette jurisprudence, ils entendent mettre le salarié en mesure de négocier le protocole d’accord transactionnel en toute connaissance des choses et, notamment, des motifs invoqués par l’employeur pour justifier le licenciement.
Dès lors, une transaction conclue entre un employeur et son salarié antérieurement à la notification de licenciement de ce dernier, encourt la nullité, sur simple demande du salarié.

La Cour de Cassation a rappelé cette règle encore récemment dans un arrêt rendu le 10 octobre 2018 (n°17-10.066), soulignant que la connaissance préalable par le salarié des motifs de son licenciement ne peut résulter que d’une notification par lettre recommandée avec avis de réception.

Si l’employeur remet cette lettre de licenciement en main propre au salarié, la transaction est nulle (Cass. Soc., 12 janvier 2016, n°14-21.402). En effet, la Haute juridiction considère que lorsque la détermination de la date de notification du licenciement revêt un caractère essentiel comme en matière de transaction, la notification par lettre remise en main propre, bien que valable, ne s’avère pas suffisante dans cette hypothèse.

Ce formalisme a sans doute pour objet d’éviter des pratiques contestables telles que celles consistant à antidater le récépissé signé par le salarié en cas de remise en main propre.

En savoir plus au sujet du licenciement :

La clause de non-concurrence

Des conditions de validité entourent la clause de non-concurrence

Aux termes d’un arrêt du 10 juillet 2002 (Cass. soc., 10 juillet 2002, n°00-45.135), la clause de non-concurrence doit être justifiée d’une part, et proportionnée d’autre part. Le caractère « justifié » est rempli dès lors que la clause est « indispensable à la protection des intérêts légitimes de l’entreprise ».  Dans ce contexte, la clause doit être indispensable à la protection des intérêts de l’entreprise eu égard des fonctions exercées par le salarié. Le caractère « proportionné » implique quant à lui trois éléments. Ainsi, la clause doit être :
– Proportionnée quant à son étendue
– « Limitée dans le temps », « limitée dans l’espace » et « tenir compte des spécificités de l’emploi du salarié »
– Proportionnée quant à sa contrepartie qui doit être réelle et sérieuse.

Les sanctions attachées au non-respect des conditions de validité

Par principe, la clause qui ne remplit pas les conditions de validité est nulle. Il s’agit toutefois d’une nullité relative. Néanmoins, en cas d’absence de contrepartie financière, elle peut être déclarée inopposable au salarié par le juge des référés dans l’attente de son annulation par les juges du fond.

Les sanctions du non-respect de la clause de non-concurrence par le salarié

En cas de non-respect de sa clause de non-concurrence, le salarié ne pourra plus prétendre au bénéfice de la contrepartie financière prévue. Il pourra même être condamné à payer à l’employeur des dommages et intérêts, sous réserve pour lui de démontrer qu’il a subi un préjudice du fait de l’activité de son ancien salarié.

Quid de la clause de non-concurrence en cas de fermeture de l’entreprise ?

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