Requalification en CDI des CDD d'usage successifs conclus avec un même salarié sur un emploi permanent

Requalification en CDI des CDD d’usage successifs conclus avec un même salarié sur un emploi permanent

Doivent être requalifiés en un contrat à durée indéterminée les CDD d’usage successifs conclus avec un salarié employé chaque mois depuis 17 ans sur un nombre de jours quasi-constant et ayant, de ce fait, pour objet de pourvoir durablement un emploi permanent (Cass. Soc., 9 octobre 2013, n°12-17.882).

La question tranchée ici porte sur les conditions de recours au CDD d’usage.

En l’espèce, un régisseur avait été employé chaque mois depuis 17 ans sur un nombre de jours quasi constant par une société relevant du secteur des spectacles, par roulement avec d’autres régisseurs, pour une mission technique indépendante du contenu des émissions produites par cette société. Si ces émissions avaient varié dans le temps par leur contenu, leur durée et leur fréquence, l’activité de production de la société était permanente, de même que l’activité du salarié.

La Cour d’appel en avait déduit que les CDD d’usage successifs conclus avec l’intéressé avaient pour objet de pourvoir durablement un emploi lié à l’activité normale et permanente de l’entreprise. Elle avait donc requalifié la relation de travail entre les parties en un contrat à durée indéterminée.

Cette décision était conforme à la jurisprudence de la Cour de Cassation selon laquelle la détermination, par accord collectif, de la liste précise des emplois pour lesquels il peut être recouru au CDD d’usage ne dispense pas le juge, en cas de litige, de vérifier concrètement l’existence de raisons objectives établissant le caractère par nature temporaire de l’emploi concerné (Cass. soc., 30 novembre 2010, n° 09-68.609 ; Cass. soc. ,16 mai 2012, n° 11-11.851).

Pour contester cette jurisprudence, l’employeur s’appuyait sur le droit communautaire et notamment la directive européenne 99/70 du 29 juin 1999 considérant que la convention collective constitue une raison objective de recours au contrat à durée déterminée d’usage.

Cette argumentation est rejetée. Il résulte en effet de la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne que la justification du recours à des contrats à durée déterminée successifs doit reposer, non pas sur des normes générales, mais sur des circonstances précises et concrètes résultant notamment de la nature particulière des tâches à accomplir (CJCE 4 juillet 2006 aff. 212/04). Or, une convention collective constitue bien une norme de nature générale et ne peut pas justifier des raisons autorisant le recours au CDD d’usage. En outre, la directive de 1999 n’institue que des règles minimales et son article 8.1 ouvre aux Etats membres la possibilité d’introduire des dispositions plus favorables pour les travailleurs. La Cour de cassation a donc maintenu sa jurisprudence sur ce point.

Stéphanie Jourquin, Avocat en droit du travail à Nice

Le licenciement d'un salarié en raison de son témoignage en justice en faveur d'un collègue est nul

Le licenciement d’un salarié en raison de son témoignage en justice en faveur d’un collègue est nul

Le droit de témoigner en justice étant une liberté fondamentale, le licenciement d’un salarié décidé au motif qu’il a délivré en justice une attestation de témoin au bénéfice d’un collègue de travail destinée à être produite dans un litige prud’homal, est nul, sauf mauvaise foi de sa part (Cass. Soc., 29 octobre 2013, n°12-22.447).

En l’espèce, l’employeur reprochait au salarié témoin d’avoir menti et informé ses collègues de son intention, donnant ainsi une publicité à son opposition envers la direction et manquant ainsi à son obligation de loyauté.

Donnant raison à l’employeur, la Cour d’appel avait refusé d’annuler le licenciement.

Sa décision est cassée, au visa des articles 6 et 10 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, consacrant respectivement le droit à un procès équitable et la liberté d’expression : en raison de l’atteinte  portée à la liberté fondamentale de témoigner, garantie d’une bonne justice, le licenciement prononcé en raison du contenu d’une attestation délivrée par un salarié au bénéfice d’un autre est nul, sauf en cas de mauvaise foi de son auteur.

Stéphanie Jourquin, Avocat en droit du travail à Nice

Peut-on licencier une femme enceinte ?

Peut-on licencier une femme enceinte ?

La salariée enceinte est protégée contre le licenciement à partir du jour où elle a informé l’employeur de sa grossesse en lui remettant, en main propre ou par lettre recommandée, au plus tard dans les 15 jours de la notification du licenciement, un certificat médical attestant de son état de grossesse et indiquant la date présumée de l’accouchement. L’employeur est alors tenu de réintégrer immédiatement la salariée dans son emploi ou un emploi similaire. 

Avant le congé de maternité, le licenciement est possible seulement dans les deux cas suivants :

* faute grave de la salariée non liée à son état de grossesse : par exemple, comportement violent ou injurieux, malversations ou fautes professionnelles graves ;

* impossibilité de maintenir le contrat pour un motif étranger à la grossesse et indépendant du comportement de l’intéressée (par exemple, en cas de motif économique justifiant la suppression du poste). 

Pendant le congé de maternité, la protection est absolue : aucun licenciement, quel qu’en soit le motif (faute grave ou motif économique), ne peut intervenir pendant la période de suspension du contrat de travail à laquelle la salariée a droit avant et après l’accouchement, y compris en cas de majoration conventionnelle de la durée du congé de maternité, et ce :  

* même si la salariée n’a pas pris la totalité du congé de maternité auquel elle a droit ;

* aux périodes de congés pathologiques légales qui prolongent la durée du congé de maternité.  

Les mesures préparatoires au licenciement sont également interdites pendant le congé de maternité. Il a été jugé qu’est nul un licenciement prononcé peu après un retour de congé, s’il est établi que l’employeur l’a préparé pendant cette période en engageant une salariée durant le congé de maternité de l’intéressée afin de pourvoir à son remplacement définitif (Cass. Soc., 15 septembre 2010, n°08-43.299). 

A l’issue du congé de maternité, la protection prévue est prolongée pendant les 4 semaines après la fin du congé légal ou conventionnel de maternité, éventuellement prolongé pour raisons pathologiques. 

Tout licenciement prononcé au mépris des règles prévues par le Code du travail est nul de plein droit. La salariée a droit, dans ce cas, à être réintégrée dans son emploi ou un emploi similaire ou, si elle ne souhaite pas revenir dans l’entreprise, à des dommages et intérêts. Les employeurs sont également passibles de sanctions pénales (contravention de 5e classe). 

Stéphanie Jourquin, Avocat en droit du travail à Nice

Portabilité de la prévoyance portée de 9 à 12 mois

Portabilité de la prévoyance portée de 9 à 12 mois

En cas de départ de l’entreprise ouvrant droit à l’assurance chômage (sauf rupture pour faute lourde), les salariés doivent pouvoir conserver, pendant leur période de chômage, le bénéfice des garanties complémentaires santé et prévoyance appliquées dans leur ancienne entreprise, pour une durée égale à celle de leur ancien contrat de travail, apprécié en mois entiers, dans la limite de 9 mois (durée portée à 12 mois par l’ANI du 11 janvier 2013, qui ne pourra toutefois entrer en vigueur qu’après sa transposition dans le Code du travail).
Cette obligation s’impose aux employeurs appartenant aux branches d’activité représentées par le Medef, la CGPME ou l’UPA (mais pas aux autres, et notamment pas aux professions libérales).

Sont concernés tous les salariés, sous contrat à durée indéterminée ou déterminée, qui ont ouvert des droits à couverture complémentaire chez leur employeur.

Le financement du dispositif est assuré par un système de mutualisation (le coût est supporté par l’entreprise et les salariés en activité – Loi 2013-504 du 14 juin 2013, article 1er, II).

L’employeur doit signaler le maintien des garanties dans le certificat de travail et informer l’organisme assureur de la cessation du contrat de travail.

Le salarié doit justifier auprès de son organisme assureur, à l’ouverture et au cours de la période de maintien des garanties, de ce qu’il remplit les conditions requises pour avoir droit à la portabilité.

Ces nouvelles dispositions entreront en vigueur à compter :

  • du 1er juin 2014 pour le remboursement des frais de santé
  • du 1er juin 2015 pour les garanties prévoyance (décès, incapacité de travail et invalidité).

Pour les entreprises qui ne bénéficieront d’une couverture de remboursements des frais de santé que le 1er janvier 2016, la portabilité n’entrera en vigueur effectivement qu’à cette date.

Stéphanie Jourquin, Avocat en droit du travail à Nice

L'employeur peut-il licencier un salarié mal habillé ?

L’employeur peut-il licencier un salarié mal habillé ?

Choisir ses vêtements relève en principe de la liberté individuelle de chacun, laquelle peut toutefois être encadrée au travail en leur imposant le choix d’une tenue décente et correcte, et fonction de l’emploi occupé.

Les salariés doivent adopter une tenue décente et qui ne soit pas susceptible de créer un trouble dans l’entreprise ou de choquer la clientèle. Par exemple, une salariée qui porte un chemisier transparent sans soutien-gorge peut être sanctionnée, voire licenciée pour ce motif, surtout si elle persiste malgré les injonctions de l’employeur et/ou travaille en contact avec la clientèle (Cass. Soc., 22 juillet 1986, n°82-43.824).

L’employeur peut exiger une tenue correcte au regard des fonctions occupées. Ainsi, le port d’un costume et d’une cravate chez les hommes ne se justifie pas pour tous les métiers. Par exemple, si une telle obligation a pu être jugée légitime pour un veilleur de nuit dans un hôtel de grand standing (CA Paris 18 janvier 1991, 22e ch. B, Arfaoui c/ SA Hôtel du Bois), elle est en revanche excessive pour du personnel ambulancier (Cass. Soc., 19 mai 1998, n°96-41.123) ou pour un technicien d’exploitation (CA Paris 24 juin 2010 n° 08/10334, P. 6 ch. 7, SAHN Services c/ R).

Un salarié travaillant en contact avec la clientèle peut se voir interdire de porter un bermuda (Cass. soc., 12 novembre 2008, n° 07-42.220) ou un survêtement (Cass. Soc., 6 novembre 2001, n°99-43.988). Mais un débardeur échancré et un pantalon en toile ont pu être tolérés en période de canicule et compte tenu des caprices de la mode, tant que cette tenue est propre et soignée. S’agissant du port de jeans, tout dépend du contexte (CA Paris 9 septembre 2005, n° 04-36314, 18e soc. E, Navas c/ SA Téléperformance France). Le salarié d’une entreprise de sécurité se présentant en jeans troués, t-shirt et veste de treillis chez un client de l’employeur commet une faute (CA Paris 25 janvier 2011 n° 09-2207, ch. 6-10, P. c/ SA Bodyguard). En revanche, il ne peut être reproché à une salariée de se rendre chez un client en jeans et bottes, cette tenue étant correcte tant qu’elle est normalement soignée (CA Paris 9 octobre 2008 n° 06-13511, 21e ch. B, SA 3S Informatique c/ Lebas).

L’employeur peut demander à ses salariés de respecter une particularité vestimentaire liée à l’image de marque de l’entreprise : il peut demander à un employé de pompes funèbres de se vêtir tout de noir jusqu’aux chaussettes (CA Paris 24 mars 2010 n° 08-9032, ch. 6-9, SA OGF c/ L.).

L’employeur peut parfois imposer le port d’un uniforme s’il est justifié par la nature de l’emploi occupé : personnel d’accueil, employé de restauration, etc., ou d’un insigne particulier lorsque cette contrainte est liée, dans l’intérêt de l’entreprise, à l’exercice de certaines fonctions : activité de gardiennage, contacts avec la clientèle…. Dans ce cas, le refus du salarié de le porter est fautif et peut justifier un licenciement (Cass. soc., 18 février 1998, n° 95-43.491 ; 3 juin 2009, n° 08-40.346).

Imposer un uniforme aux salariés comporte un coût pour l’employeur : il doit le fournir et en assurer l’entretien. De plus, si les salariés doivent se changer sur le lieu de travail, il doit mettre des vestiaires à leur disposition et leur accorder une contrepartie, financière ou en repos, pour le temps d’habillage et de déshabillage, qui n’est pas du temps de travail sauf si le contrat de travail ou la convention collective prévoit le contraire.

Pour certains métiers dangereux, un équipement de protection est obligatoire (chaussures de sécurité, casque, gants de protection, port d’une blouse, etc.). L’employeur est alors tenu de fournir et d’entretenir cet équipement en raison de son obligation de sécurité de résultat (article L 421-1 du Code du travail) à l’égard des salariés, ces derniers devant se conformer aux exigences dictées pour leur sécurité.

Dans les entreprises gérant un service public (comme les caisses primaires d’assurance maladie), les salariés ont une stricte obligation de neutralité découlant de l’application du principe de laïcité et ne doivent pas manifester leur appartenance religieuse, y compris par le port d’un vêtement religieux.

Dans les autres entreprises privées, les salariés sont en principe libres de porter un tel vêtement, notamment un foulard islamique. L’employeur ne peut apporter, notamment dans la rédaction du règlement intérieur, de restriction à leur liberté religieuse que si elle est justifiée par la nature de la tâche à accomplir, répond à une exigence professionnelle essentielle et déterminante et est proportionnée au but recherché. Par exemple, des impératifs de sécurité peuvent justifier de telles restrictions.

En revanche, la chambre sociale de la Cour de cassation a estimé dans l’affaire Baby-Loup qu’une clause du règlement intérieur d’une crèche privée imposant à tout son personnel une obligation de neutralité religieuse était trop générale et imprécise et ne respectait pas l’exigence de proportionnalité (Arrêt de la chambre sociale de la Cour de cassation du 19 mars 2013, n°11-28.845).

En tout état de cause, les salariées exécutant leur travail dans un espace public (tel un magasin) ne doivent pas porter de tenues destinées à dissimuler en tout ou partie le visage, rendant impossible l’identification de la personne. Sont notamment interdits le port de cagoules, de voiles intégraux (niqab, burqa…), de masques ou de tout autre accessoire ou vêtement ayant pour effet, pris isolément ou associé avec d’autres, de dissimuler le visage (Circ. du 2 mars 2011 : JO 3 p. 4128).

Stéphanie Jourquin, Avocat en droit du travail à Nice

 

Report au 30 juin 2014 de l’entrée en vigueur de la durée minimale de 24 heures sur le temps partiel

Report au 30 juin 2014 de l’entrée en vigueur de la durée minimale de 24 heures sur le temps partiel

La loi de sécurisation de l’emploi a institué une durée minimale de travail à temps partiel de 24 heures par semaine, à compter du 1er janvier 2014, à laquelle il peut être dérogé par accord de branche étendu ou à la demande écrite et motivée du salarié souhaitant faire face à des contraintes personnelles ou cumuler plusieurs activités.

Le ministère du travail vient d’annoncer le report au 30 juin 2014 de l’entrée en vigueur de cette obligation, afin de permettre aux branches professionnelles de poursuivre leurs négociations.

Une disposition législative en ce sens sera intégrée au projet de loi relatif à la formation professionnelle, à l’emploi et à la démocratie sociale qui sera présenté le 22 janvier prochain au Conseil des Ministres.

La consultation par l’employeur de la Délégation Unique du Personnel en cas d’inaptitude professionnelle

La consultation par l’employeur de la Délégation Unique du Personnel en cas d’inaptitude professionnelle

Face à une inaptitude d’origine professionnelle, l’employeur doit consulter les élus en leur qualité de délégués du personnel sur l’examen du reclassement professionnel du salarié déclaré inapte à la suite d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle, au risque de rendre sans cause réelle et sérieuse le licenciement notifié.

En présence d’une Délégation Unique du Personnel (DUP), la consultation des élus n’est valable que si elle l’est en tant que délégués du personnel et non en tant que comité d’entreprise.

L’avis des délégués du personnel sur le reclassement du salarié déclaré inapte à la suite d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle doit être recueilli après que l’inaptitude a été constatée dans les conditions prévues par l’article R 4624-31 du Code du travail et avant la proposition à l’intéressé d’un poste de reclassement approprié à ses capacités.

L’avis des délégués du personnel concluant à l’absence de possibilité de reclassement du salarié ne dispense pas l’employeur de rechercher l’existence d’une telle possibilité dans l’entreprise, au besoin, ainsi que le prévoit l’article L 1226-10, al. 3 du Code du travail, par la mise en œuvre de mesures telles que mutations, transformations de postes ou aménagement du temps de travail.
En prés
ence d’une DUP constituée dans l’entreprise, les délégués du personnel et le comité d’entreprise conservent l’ensemble de leurs attributions. Il en résulte que la convocation par l’employeur des membres titulaires et des membres suppléants de la délégation unique du personnel pour examiner, en leur qualité de délégués du personnel, la situation du salarié suite à son accident du travail avant de mettre en œuvre la procédure de licenciement, répond à ces exigences (Cass. Soc., 18 novembre 2003, n°01-44.235).

L’employeur ne saurait se soustraire à cette obligation au motif qu’il a consulté le comité d’entreprise et sans démontrer que la consultation des délégués du personnel n’était pas possible en raison de leur absence constatée par un procès-verbal de carence (CA Paris, 28 juin 2007, n°06-558, 21ème ch. B, San Eng c/ SAS E. Leclerc Vitry Distribution).

Cette référence à la consultation du comité d’entreprise en cas de DUP est en effet inopérante, seule comptant la consultation par l’employeur des délégués du personnel pour solliciter leur avis sur les postes de reclassement pouvant être proposés au salarié (Cass. Soc., 28 avril 2011, n°09-70.918 ; CA Versailles, 6 novembre 2013, n°647-2013, 17ème ch., Postal c/ Union Départementale des Associations Familiales des Yvelines).

La conséquence d’une telle consultation est de rendre sans cause réelle et sérieuse le licenciement pour inaptitude professionnelle, de sorte que le salarié peut dans un tel cas prétendre (en l’absence de réintégration) à une indemnité qui ne peut être inférieure à douze mois de salaires (article L 1226-15 du Code du travail).

Elle se cumule avec l’indemnité compensatrice et, le cas échéant, l’indemnité spéciale de licenciement, prévues à l’article L. 1226-14 du Code du travail.

L'aide à domicile à temps partiel doit connaître ses horaires avant le début du mois

L’aide à domicile à temps partiel doit connaître ses horaires avant le début du mois

Les horaires de travail des salariés à temps partiel des entreprises et associations d’aide à domicile doivent connaître leurs horaires de travail avant le début de chaque mois, en l’absence de précision dans leur contrat de travail relative au jour du mois auquel sont communiqués par écrit ces horaires.

Contrairement aux autres employeurs, les associations et entreprises d’aide à domicile qui emploient des salariés à temps partiel ne sont pas tenues de mentionner dans le contrat des intéressés la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine (ou les semaines du mois). Mais les intéressés doivent en revanche recevoir communication de leurs horaires chaque mois par écrit (article L 3123-14 du Code du travail).

La chambre sociale de la Cour de cassation précise qu’en l’absence, dans le contrat de travail, de stipulations relatives au jour du mois auquel sont communiqués par écrit les horaires de travail, ceux-ci doivent l’être avant le début de chaque mois et que l’absence d’une telle communication fait présumer que l’emploi est à temps complet (Cass. Soc., 20 février 2013, n°11-24.012).

Le Code du travail n’exige pas la communication des horaires de travail au salarié le premier jour de chaque mois, mais une telle communication doit néanmoins intervenir avant le début de chaque période de travail, pour permettre au salarié de prévoir son rythme de travail et connaître ainsi le temps qu’il consacrera à son employeur et celui qu’il pourra réserver à des activités personnelles ou à une autre activité professionnelle.

L’absence, le retard de communication par l’employeur des plannings de travail, ou leur modification régulière en cours de mois (entraînant un nombre d’heures travaillées variant d’un mois à l’autre) ne permet pas au salarié de connaître à l’avance son rythme de travail et lui impose en conséquence d’être à la disposition constante de son employeur, ce qui justifie l’application de la présomption de travail à temps complet.

L’employeur peut cependant combattre cette présomption en rapportant la preuve, d’une part, de la durée exacte hebdomadaire ou mensuelle convenue, d’autre part, que le salarié n’était pas placé dans l’impossibilité de prévoir à quel rythme il devait travailler et qu’il n’avait pas à se tenir constamment à sa disposition.

Stéphanie Jourquin, Avocat en droit du travail à Nice

La rupture de la période d'essai dès le retour d'un long arrêt maladie n'est pas forcément abusive

La rupture de la période d’essai dès le retour d’un long arrêt maladie n’est pas forcément abusive

L’employeur peut en principe rompre la période d’essai sans avoir à donner de motifs. Il ne doit cependant commettre aucun abus dans l’exercice de cette liberté.

Ainsi, la période d’essai étant destinée à lui permettre d’apprécier les qualités professionnelles du salarié, sa rupture pour un motif non inhérent à la personne de l’intéressé (motif économique par exemple) est abusive (Cass. soc., 20 novembre 2007, n° 06-41.212). L’employeur ne doit pas non plus se rendre coupable de discrimination. Par exemple, la rupture en raison des récents problèmes de santé du salarié est nulle (Cass. soc., 16 février 2005, n° 02-43.402).

Dans un arrêt du 9 octobre 2013 (Cass. Soc., 9 octobre 2013, n°12-18.570), la Cour de Cassation a estimé que la rupture de la période d’essai, le jour même de la visite de reprise à la suite d’un arrêt de travail de plus de 7 mois, n’est pas discriminatoire, dès lors qu’elle tient à l’insuffisance des capacités professionnelles du salarié.

Dans cette affaire, le salarié avait été victime d’un accident au cours de sa période d’essai et avait été en arrêt de travail pendant plus de 7 mois. L’employeur lui avait annoncé la fin des relations contractuelles le jour même de la visite de reprise, au cours de laquelle il avait été déclaré apte sans réserve. Il s’agissait bien d’une rupture de la période d’essai, celle-ci ayant été prolongée de la durée de l’absence du salarié conformément à la jurisprudence considérant que cette période ne doit souffrir ni suspension ni interruption (Cass. soc., 12 janvier 1993, n° 88-44.572). Mais le salarié s’estimait victime de discrimination, la rupture étant à ses yeux motivée par son état de santé. La Cour de cassation ne lui donne pas gain de cause, les juges du fond ayant souverainement estimé que la rupture de la période d’essai était bien fondée sur l’insuffisance de ses capacités professionnelles.

Dans la même veine, il a déjà été jugé que n’est pas abusive la rupture du contrat intervenue au cours d’un arrêt de travail à la suite d’un accident de trajet, dès lors que l’employeur a informé le salarié de sa décision de rompre avant ledit arrêt (Cass. soc., 4 avril 2012, n° 10-23.876).

On rappellera que si l’employeur peut rompre la période d’essai au cours de l’arrêt de travail pour maladie ou accident non professionnel, dès lors que le salarié n’a pas donné satisfaction, il ne peut en revanche le faire pendant un arrêt de travail pour maladie ou accident professionnel en raison de la protection dont bénéficie alors le salarié, sauf faute grave ou impossibilité de maintenir le contrat (Cass. soc., 12 mai 2004, n° 02-44.325).

Stéphanie Jourquin, Avocat en droit du travail à Nice

 

 

 

Les courriels issus d'une messagerie personnelle ne peuvent servir à prouver une faute du salarié

Les courriels issus d’une messagerie personnelle ne peuvent servir à prouver une faute du salarié

Les courriels envoyés sur une messagerie personnelle d’un ancien salarié ne sont pas recevables comme mode de preuve d’actes de concurrence déloyale, même si le contenu de ces courriels est en rapport avec son activité professionnelle (Cass. Com., 16 avril 2013, n°12-15.657).

Selon une jurisprudence bien établie, l’employeur peut librement contrôler les courriels transmis ou reçus par le salarié au moyen de la messagerie professionnelle de l’entreprise et qui n’ont pas été identifiés par l’intéressé comme étant personnels (Cass. soc. 15 décembre 2010 n° 08-42.486). Mais l’employeur peut-il se prévaloir d’un courriel reçu par un salarié, ou un ancien salarié, sur une messagerie qui lui est personnelle, et ce, même si son contenu est en rapport avec l’activité professionnelle de l’intéressé ?

Dans cette affaire, deux anciens salariés licenciés ont constitué une société concurrente. Leur reprochant des actes de concurrence déloyale et de parasitisme l’ancien employeur avait produit des courriels relatifs à des commandes, transmis par un client sur une adresse personnelle d’un des anciens salariés, distincte de l’adresse professionnelle dont il disposait pour les besoins de son ancienne activité. La chambre commerciale de la Cour de cassation n’a donc pas retenu l’argument de l’employeur selon lequel ces courriels traitant de l’activité commerciale de l’entreprise, ils ne revêtaient pas un caractère privé et pouvaient être retenus comme éléments de preuve. Un tel courriel constitue en effet par nature une correspondance privée.

Dans ce domaine la chambre sociale tient une position similaire : en raison de leur caractère purement privé, les messages que des salariés s’échangent depuis leur messagerie personnelle ne sauraient constituer, quelle qu’en soit la teneur (par exemple courriel dénigrant son supérieur hiérarchique), un manquement à leur obligation de loyauté envers l’employeur (Cass. soc. 26 janvier 2012 n° 11-10.189).

Stéphanie Jourquin, Avocat en droit du travail à Nice

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