Qui harcèle un collègue au téléphone même pour des motifs tenant à la vie privée peut être licencié

Un salarié qui, pendant le temps de travail et sur le lieu de travail, émet des appels téléphoniques répétés depuis son poste professionnel, sur celui d’un collègue de travail se plaignant d’être harcelé, peut être licencié pour faute grave (Cass. Soc., 27 novembre 2013, n°12-21.057).Ces agissements à l’égard d’une personne avec laquelle le salarié était en contact en raison de son travail ne relèvent pas de sa vie personnelle, quand bien même il aurait eu avec l’intéressé une relation sentimentale.

La Cour de cassation reprend les termes d’un précédent arrêt dans lequel elle a jugé que les propos à caractère sexuel et les attitudes déplacées d’un salarié à l’égard de personnes avec lesquelles il était en contact en raison de son travail ne relèvent pas de sa vie personnelle (Cass. soc. 19 octobre 2011 n° 09-72.672).

Cette décision s’inscrit dans la continuité de la jurisprudence bien établie selon laquelle un fait de lavie personnelle ne peut pas justifier l’engagement d’une procédure disciplinaire débouchant sur une sanction, sauf s’il se rattache à la vie professionnelle du salarié.

Le CHSCT doit être consulté en cas de modification du règlement intérieur

Le Comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail a pour mission de contribuer à la protection de la santé physique et mentale et de la sécurité des travailleurs, et de contribuer à l’amélioration des conditions de travail, notamment en vue de faciliter l’accès des femmes à tous les emplois et de répondre aux problèmes liés à la maternité. 

Il résulte des dispositions de l’article L. 1321-4 du Code du travail que les clauses du règlement intérieur ne peuvent être modifiées qu’après que le projet a été soumis à l’avis du Comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail pour les matières relevant de sa compétence. 

En conséquence, il doit être consulté préalablement à la modification du règlement intérieur intervenue pour préciser que les salariés peuvent revêtir les vêtements de travail fourmis par l’employeur en dehors de l’entreprise dès lors qu’il s’agit pour eux de venir travailler ou de rentrer à leur domicile après le travail (Cass. Soc., 11 février 2015, n°13-16.457).

 

L’absence de visite médicale d’embauche ne justifie pas une prise d’acte

La prise d’acte permet au salarié de rompre le contrat de travail en cas de manquement suffisamment grave de l’employeur empêchant la poursuite du contrat de travail.

L’absence avérée de visite médicale d’embauche ne constitue cependant pas un manquement de l’employeur suffisamment grave pour justifier la prise d’acte de la rupture du contrat de travail par le salarié, dès lors que le manquement de l’employeur, qui ne résultait pas d’un refus mais d’une simple négligence, n’a pas empêché la poursuite du contrat de travail (Cass. Soc., 18 février 2015, n°13-21.804).

Loi Macron et prud’hommes

Adopté en première lecture par l’Assemblée Nationale courant février, le projet de loi Macron « pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques » sera examiné par le Sénat le mois prochain. Les dispositions qui visent à réformer la justice prud’homale sont nombreuses. Parmi elles, la volonté de raccourcir les délais de jugement.

Dans ce contexte, le bureau de conciliation (qui devient le « bureau de conciliation et d’orientation ») reste le point d’entrée de toutes procédures. Mais si le texte est promulgué en l’état, trois options seront alors possibles.

En cas d’échec de la conciliation, l’affaire pourra être renvoyée :

 1. soit devant la formation normale du bureau de jugement (4 conseillers) ;
2. soit devant la formation dite restreinte du bureau de jugement (2 juges paritaires qui devront statuer dans les 3 mois). Ce renvoi nécessite l’accord préalable des parties et ne pourra concerner que les dossiers relativement simples (litige portant sur un licenciement ou une demande de résiliation judiciaire du contrat de travail) ;
3. soit directement devant la formation de départage (présidée par un juge professionnel) dans 2 situations particulières : lorsque la nature du litige le justifie ou si les 2 parties le demandent.

A noter que le bureau de conciliation et d’orientation, qui sera dorénavant chargé d’assurer la mise en état des affaires, aura la possibilité de juger le dossier en cas de non comparution d’une partie à l’audience de conciliation. Seule exception à cette prérogative : le motif légitime.

Texte adopté n° 473 « Petite loi » – 19 février 2015 (article 83)

Modalités de fixation des objectifs en matière de rémunération variable

Les objectifs d’un salarié, conditionnant la partie variable de sa rémunération peuvent être définis par l’employeur seul dans le cadre de son pouvoir de direction (Cass. Soc., 2 mars 2011, n°08-44.977), sauf si le contrat de travail prévoit l’accord du salarié pour leur fixation. 

Fixation unilatérale par l’employeur : les objectifs fixés doivent être réalistes et réalisables compte tenu de la situation économique du secteur professionnel dans lequel évolue le salarié, de ses compétences et des moyens mis à sa disposition (Cass. Soc., 22 mai 2001, n°99-41.838 ; Cass. Soc., 2 décembre 2003, n°01-44.192). 

Ils doivent être portés à la connaissance du salarié en début d’exercice de façon précise et dans sa langue (Cass. Soc., 2 mars 2011, n°08-44.977). 

En outre, l’employeur doit lui communiquer les données servant de base au calcul de ses commissions 

Fixation conjointe par l’employeur et le salarié : les mêmes règles s’appliquent. 

Défaut de fixation des objectifs : si la rémunération variable n’est pas liée à l’atteinte d’objectifs préalablement fixés par l’employeur, elle est due à l’ensemble des salariés placés dans la même situation (Cass. Soc.,  juin 2013, n°11-28.934). 

En cas d’absence de fixation des objectifs à l’occasion du réexamen annuel de la rémunération, l’employeur ne peut pas refuser de verser la partie variable prévue au contrat au motif qu’aucun accord n’est intervenu entre les parties pour en fixer le montant. Il ne peut pas davantage déterminer unilatéralement la partie variable. En effet, en l’absence d’accord avec le salarié, il incombe aux juges du fond de déterminer cette partie variable en fonction des critères visés au contrat et des accords conclus les années précédentes (Cass. Soc., 13 juillet 2004, n°02-14.140 ; 15 décembre 2009, n°08-44.563).

L’employeur peut consulter les SMS envoyés par ses salariés

Les messages écrits (« short message service » ou SMS) envoyés ou reçus par le salarié au moyen du téléphone mis à sa disposition par l’employeur pour les besoins de son travail sont présumés avoir un caractère professionnel. Il en va de même des courriels envoyés via la messagerie professionnelle.

Dès lors, l’employeur est en droit de les consulter en dehors de la présence de l’intéressé, sauf s’ils sont identifiés comme étant personnels.

De tels messages peuvent aussi être produits en justice, sans que cela ne constitue un procédé déloyal au sens des articles 9 du code civil et 6, paragraphe 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales (Cass. Soc., 10 février 2015, n°13-14.779).

 

Dangers de la requalification du contrat à temps partiel en temps plein

La demande de requalification d’un contrat de travail à temps partiel en un contrat à temps plein est légitime pour le salarié dès lors que les heures effectuées correspondent à un temps plein, même sur une courte période d’un mois. Le salarié peut alors obtenir le paiement des rappels de salaires correspondant au temps plein pour les mois suivants la première irrégularité (Cass. Soc., 12 mars 2014, n°12-15.014 ; Cass. Soc., 17 décembre 2014, n°13-20.627).

 

Obligation de respecter la clause de non-concurrence en cas de fermeture de l’entreprise

La clause de non-concurrence prenant effet à compter de la rupture du contrat de travail, la cessation d’activité ultérieure de l’employeur n’a pas pour effet de décharger le salarié de son obligation de non-concurrence (Cass. Soc., 21 janvier 2015, n°13-26.374).

Dès lors que le salarié n’a pas été libéré de son obligation par l’employeur, il peut demander au juge le paiement de la contrepartie financière au prorata de la durée d’exécution de l’obligation de non-concurrence, et ce, même si l’employeur a fait l’objet d’un jugement de liquidation judiciaire après la rupture du contrat de travail.

Temps partiel: les heures excédant le 10ème ou le tiers de la durée contractuelle de travail sont majorées

En principe, le nombre d’heures complémentaires pouvant être effectué par un salarié à temps partiel ne peut pas excéder le dixième de la durée de travail prévue dans son contrat (article L 3123-17 du Code du travail), voire le tiers de cette durée par accord collectif de branche étendu ou accord d’entreprise ou d’établissement (article L 3123-18). 

Chacune des heures complémentaires accomplies au-delà de ces deux seuils donne lieu à une majoration de salaire de 25 % en application de l’article L 3123-19 du Code du travail, ou d’au moins 10% en application  d’une convention ou un accord de branche étendu (Cass. Soc., 7 décembre 2010, n° 09-42.315 ; 2 juillet 2014, n°13-15.954). 

La Cour de cassation a aussi jugé que les heures excédant la limite légale des heures complémentaires ne constituaient pas des heures supplémentaires (Cass. soc., 27 février, 2001 n° 98-45.610 ; 16 novembre 2005, n° 98-45.610).

Sauf mauvaise volonté délibérée du salarié, l’insuffisance professionnelle n’est pas fautive

L’incompétence d’un salarié ne peut justifier un licenciement disciplinaire que si elle procède d’une abstention volontaire ou d’une mauvaise volonté délibérée de sa part. 

Selon une jurisprudence constante de la Cour de cassation, l’insuffisance professionnelle n’est pas fautive. A la différence de la faute professionnelle, elle résulte en effet d’un comportement involontaire du salarié (Cass. Soc., 27 novembre 2013, n°11-22.449 et 12-19.898 ; Cass. Soc., 10 décembre 2014, n°13-22.198).  

L’employeur qui reproche à un salarié la mauvaise qualité de son travail ne doit donc en aucun cas prononcer un licenciement pour faute. En effet, s’il se place sur le terrain disciplinaire, le licenciement sera automatiquement jugé sans cause réelle et sérieuse. Si toutefois l’employeur établit que les erreurs commises par le salarié résultent d’une abstention volontaire ou d’une mauvaise volonté délibérée, il peut prononcer un licenciement pour faute.

Go to Top