Le salarié à temps partiel ne doit pas travailler à temps plein

La requalification du contrat de travail à durée indéterminée à temps partiel en un contrat à durée indéterminée à temps complet peut intervenir lorsque le salarié, en raison des modifications fréquentes, sinon incessantes, apportées par l’employeur à son temps de travail, est dans l’impossibilité de prévoir à quel rythme il doit travailler, de sorte qu’il doit se tenir à la disposition constante de son employeur.

Si le salarié à temps partiel a travaillé à temps plein avec des heures complémentaires, même sur une courte période isolée d’un mois en près de 8 ans d’ancienneté, la requalification de son contrat en un contrat à temps plein est encourue (Cass. Soc., 12 mars 2014, n°12-15.014).

Exemples de motifs de prise d’acte de rupture

La prise d’acte ou la résiliation judiciaire aux torts de l’employeur permet au salarié de rompre le contrat de travail en cas de manquement suffisamment grave de l’employeur empêchant la poursuite du contrat de travail.

Ces manquements ne doivent pas être trop anciens (Cass. Soc., 26 mars 2014, n°12-23.634).

Ainsi, l’absence de visite médicale de reprise procédant d’une erreur des services administratifs de l’employeur qui n’avait pas été commise lors des précédents arrêts de travail et qui n’avait pas empêché la poursuite du contrat de travail pendant plusieurs mois, n’est pas suffisamment grave (Cass. Soc., 26 mars 2014, n°12-35.040).

De même, la modification unilatérale appliquée par l’employeur du mode de rémunération n’ayant pas exercé d’influence défavorable sur le montant de la rémunération perçue par le salarié pendant plusieurs années, n’est pas de nature à empêcher la poursuite du contrat de travail (Cass. Soc., 12 juin 2014, n°13-11.448 ; 12-29.063).

En revanche, la mesure de suspension des fonctions du salarié par l’employeur fondée sur aucune disposition légale constitue un manquement grave justifiant une rupture du contrat de travail, quand bien même le salarié aurait été licencié moins d’un mois plus tard (Cass. Soc., 26 mars 2014, n°12-21.372).

Rupture abusive du CDD par l’employeur

La rupture abusive par l’employeur d’un contrat de travail à durée déterminée ouvre droit pour le salarié à des dommages-intérêts.

Une fois la période d’essai éventuelle achevée, l’employeur ne peut rompre un contrat à durée déterminée (CDD) avant son terme que dans les cas suivants : accord du salarié, faute grave du salarié, inaptitude physique du salarié constatée par le médecin du travail, force majeure.

Toute rupture anticipée du contrat par l’employeur en dehors de ces cas est une rupture abusive du contrat de travail ouvrant droit pour le salarié à des dommages-intérêts. L’action en paiement de cette indemnité se prescrit par deux ans.

L’employeur qui rompt le contrat de façon anticipée, en dehors des cas indiqués ci-dessus, doit verser au salarié des dommages-intérêts d’un montant au moins égal aux rémunérations qu’il aurait perçues jusqu’au terme du contrat. Ce minimum ne peut subir aucune réduction.

Ainsi, l’employeur ne peut pas déduire les indemnités journalières de sécurité sociale pour maladie ou les allocations chômage que le salarié a perçues.

Le juge peut décider d’attribuer au salarié une indemnisation supérieure, notamment en cas de préjudice moral lié au caractère vexatoire de la rupture.

En cas de rupture abusive, le salarié peut aussi prétendre à l’indemnité de fin de contrat si le CDD a été conclu dans l’un des cas y ouvrant droit ou s’il n’a pas fait l’objet d’un écrit. Il peut aussi bénéficier d’une indemnité compensatrice de congés payés.

La rupture anticipée du contrat par le salarié en dehors des cas de faute grave de l’employeur, force majeure et embauche en contrat à durée indéterminée ouvre droit pour l’employeur à des dommages-intérêts correspondant au préjudice subi. Leur montant relève de l’appréciation souveraine du juge.

L’indemnité de fin de contrat n’est alors pas due.

Fin de l’obligation de reclassement dans certains cas d’inaptitude

La loi Rebsamen emporte des changements en matière d’inaptitude physique des salariés : Désormais, lorsque l’avis du médecin du travail précise que le maintien du salarié dans l’entreprise serait « gravement préjudiciable à sa santé », l’employeur peut rompre le contrat de travail du salarié inapte, sans avoir à rechercher de possibilités de le reclasser. (Loi sur le dialogue social et l’emploi, du 17 août 2015, publiée au JO du 18 août)

Il ne faut toutefois pas confondre l’« inaptitude à tout poste dans l’entreprise » qui est généralement mentionnée dans les avis rendus par le médecin du travail, avec les nouvelles dispositions de la loi Rebsamen. En effet, selon cette dernière, le licenciement est possible lorsque « tout maintien du salarié dans l’entreprise serait gravement préjudiciable à sa santé ».

En conséquence, sauf à ce que cette mention apparaisse impérativement dans l’avis du médecin du travail (ou dans un courrier annexe), la recherche de reclassement reste une obligation.

Il est possible que les médecins du travail hésiteront à appliquer cette mention afin de ne pas se sentir responsable de la décision de licenciement et s’en tiendront à mentionner l’inaptitude à tout poste dans l’entreprise.

Les recherches de reclassement doivent être loyales

L’employeur manque à ses obligations de loyauté et de reclassement à l’égard d’un salarié inapte lorsqu’il lui propose un reclassement impliquant que le salarié quitte son employeur pour se mettre au service d’une société tierce, et ce, sans même avoir recherché dans le périmètre de ses propres emplois disponibles une solution loyale de reclassement (Cass. Soc., 13 mai 2015, n°13-27.774).

Il est rappelé que lorsqu’un salarié est déclaré inapte par le médecin du travail, l’employeur doit rechercher loyalement une solution de reclassement, parmi les emplois aussi comparables que possible au précédent poste, au sein de l’entreprise ou, le cas échéant, du groupe auquel elle appartient. Il doit si nécessaire mettre en œuvre des mesures telles que mutations, transformations de postes, ou aménagement du temps de travail.

Si le reclassement en interne est impossible, ce n’est que subsidiairement que l’employeur peut solliciter des sociétés extérieures en vue de reclasser le salarié.

La notion de harcèlement sexuel

Dans sa rédaction antérieure à l’entrée en vigueur de la loi n°2012-954 du 6 août 2012, l’article L 1153-1 du Code du travail définissait le harcèlement sexuel essentiellement par le but poursuivi par son auteur. Etaient en effet visés les agissements de toute personne dans le but d’obtenir des faveurs de nature sexuelle à son profit ou au profit d’un tiers.

Depuis le 8 août 2012, date d’entrée en vigueur de la loi, l’article L 1153-1 du Code du travail propose une définition beaucoup plus détaillée.

Il existe deux types de harcèlement sexuel :

  1. Des faits répétés de harcèlement tels que des propos ou comportements à connotation sexuelle qui soit portent atteinte à la dignité du salarié en raison de leur caractère dégradant ou humiliant, soit créent à son encontre une situation intimidante, hostile ou offensante.

La répétition exige que les faits aient été commis au moins à deux reprises. Elle n’impose pas qu’un délai minimum sépare les actes commis, ces actes pouvant être répétés dans un très court laps de temps.

  1. Des faits « assimilés » au harcèlement sexuel, consistant en toute forme de pression grave, même non répétée, exercée dans le but réel ou apparent d’obtenir un acte de nature sexuelle, que celui-ci soit recherché au profit de l’auteur des faits ou au profit d’un tiers.

Tel est le cas d’une personne tentant d’imposer un acte de nature sexuelle à la victime en contrepartie d’un avantage qu’elle recherche ou en contrepartie de l’assurance qu’elle évitera une situation dommageable (licenciement, mutation, etc.).

La situation personnelle de la victime, son âge, sa précarité, et notamment sa capacité plus ou moins grande à résister à la pression dont elle fait l’objet, est  un élément d’interprétation.

Le harcèlement sexuel a ainsi été reconnu par les juges quand un salarié, titulaire de responsabilités, a exercé des pressions sur une salariée, amenée quotidiennement à faire le ménage de son atelier, dans le but d’obtenir des faveurs sexuelles (Cass. Soc., 19 avril 2000, n°98-40.583).

Ces faits ont été qualifiés de « chantage sexuel », qui peut être commis à l’occasion d’un unique entretien d’embauche ou de l’attribution d’une promotion professionnelle. Le chantage peut être le fait, en dehors de tout lien de subordination hiérarchique, d’une personne qui profite de l’état de faiblesse ou de vulnérabilité de la personne, sur le plan économique, par exemple, pour tenter de lui extorquer des relations sexuelles. Le but peut être « réel ou apparent ».

Les juges examinent un faisceau d’indices afin de déterminer si, objectivement, les pressions de l’auteur tendent à l’obtention d’une relation sexuelle (Rapport Sénat n° 619). A noter également que la recommandation de la Commission européenne 92/131 du 27 novembre 1991 (JOCE 1992 L 49 p.1) indique : « Un seul incident de harcèlement peut constituer à lui seul le harcèlement sexuel s’il est suffisamment grave ».

Le harcèlement sexuel a été retenu dans une affaire où la salariée a « à plusieurs reprises » dit à l’employeur qu’elle en avait « marre de son comportement » (CA Chambéry, 18 janvier 2000, RJS 4/00 n°371) ou qu’elle avait subi pendant 3 mois des avances accompagnées d’attouchements et de promesses (CA Paris, 16 janvier 1997, n° 95-36860, 18ème ch E, C c./ SNC S.).

L’envoi à une collègue d’une photographie indécente et non désirée pendant le temps et sur le lieu de travail, faisant suite à des pressions, des propositions de nature sexuelle et des attouchements physiques, caractérise le harcèlement sexuel (CA Chambéry, 15 septembre 2009, n°08-2976, ch. Soc., SAS S. c/ D.).

Le fait pour un salarié de ne pas se contenter d’entretenir avec sa collègue une relation amicale ou cordiale, mais de souhaiter que cette relation devienne plus intime et de se montrer plus pressant lorsque l’intéressé manifeste son refus, notamment en lui adressant de nombreux courriels au contenu explicite et particulièrement déplacé manifestant qu’il cherche à vaincre ce refus caractérise le harcèlement sexuel (CA Grenoble, 24 novembre 2008, n°08-471, Ch. Soc. R. c./ Caisse d’épargne L.).

Le fait pour l’employeur de multiplier les cadeaux (bijoux, vêtements, chaussures, fleurs), les appels et messages téléphoniques, de se rendre au domicile de la salariée et de s’introduire dans sa vie privée dans le but de la convaincre et même de la contraindre à céder à ses avances caractérise le harcèlement sexuel (Cass. Soc., 3 mars 2009, n°07-44.082).

La réception par une salariée, pendant son stage et après la signature de son contrat de travail, de plusieurs SMS de son supérieur hiérarchique, dans lesquels celui-ci lui écrit notamment « je te souhaite une douce journée avec plein de baisers sur tes lèvres de velours », l’intéressée ayant dans le même temps demandé une suspension de sa période d’essai et déposé une main courante auprès des services de police pour se plaindre d’un harcèlement sexuel de la part de son supérieur hiérarchique caractérise le harcèlement sexuel (Cass. Soc., 12 février 2014, n°12-26.652).

Conséquence de l’exécution du préavis après le terme de la période d’essai

La loi de modernisation du marché du travail du 25 juin 2008 a institué en matière de rupture de période d’essai un délai de prévenance dont la durée varie selon la personne prenant l’initiative de la rupture et le temps de présence du salarié dans l’entreprise. La période d’essai, renouvellement inclus, ne peut être prolongée du fait de la durée de ce délai de prévenance.

Dans une décision rendue le 5 novembre 2014, la Cour de cassation (Cass. Soc., 5 novembre 2014, n°13-18.114), a jugé qu’en cas de rupture de la période d’essai, le contrat de travail prenait fin au terme du délai de prévenance exécuté, et au plus tard à l’expiration de la période d’essai initialement prévue entre les parties.

Après le terme de l’essai, si le contrat de travail se poursuit, il existe un nouveau contrat à durée indéterminée qui ne pourra être rompu par l’employeur que par le biais d’un licenciement.

Faute de respecter la procédure de licenciement, la rupture risque d’être dépourvue de cause réelle et sérieuse et le salarié peut alors prétendre à la réparation du préjudice qui en découle en application de l’article L 1235-5 du Code du travail (Cass. Soc. 22 février 2006, n°03-46.086).

La continuation des relations contractuelles durant le préavis de rupture de la période d’essai après la fin de cette période d’essai donne donc naissance à un nouveau contrat de travail à durée indéterminée.

Il est donc préférable pour les employeurs ayant omis de respecter le délai de prévenance, de rompre en toutes hypothèses la période d’essai au terme de celle-ci, même si le délai de prévenance ne peut plus être exécuté.

Dans un tel cas, cet oubli ne rend pas le contrat définitif et la rupture ne s’analyse pas en un licenciement (ass. Soc., 23 janvier 2013, n°11-23.428). Sauf s’il a commis une faute grave, le salarié peut alors bénéficier d’un dédommagement égal au montant des salaires et avantages qu’il aurait perçus s’il avait accompli son travail jusqu’au terme du délai de prévenance. Cette somme a le caractère d’un salaire.

Le délai entre la convocation et l’entretien préalable est d’au moins 5 jours ouvrables

En application de l’article L 1232-2 du Code du travail, l’entretien préalable au licenciement ne peut avoir lieu moins de 5 jours ouvrables après la présentation de la lettre recommandée ou la remise en main propre de la lettre de convocation à l’entretien, de sorte que le jour de la présentation ou de la remise de la lettre ne compte pas dans le délai, ni le dimanche qui n’est pas un jour ouvrable  (Cass. soc., 3 juin 2015, n°14-12.245).

L’indemnité compensatrice de préavis est due en cas de licenciement pour inaptitude jugé abusif

Le salarié déclaré inapte par le médecin du travail à la suite d’une maladie ou d’un accident d’origine non professionnelle, et qui est licencié en raison d’une impossibilité de reclassement, ne peut pas prétendre à une indemnité compensatrice de préavis. En vertu de l’article L 1226-4 du Code du travail, son licenciement pour inaptitude physique prend effet dès la notification de la rupture, sans préavis.

Lorsqu’un licenciement pour inaptitude physique est jugé sans cause réelle et sérieuse en raison d’un manquement de l’employeur à son obligation de reclassement, le salarié peut prétendre à une indemnité compensatrice de préavis. (Cass. Soc., 6 mai 2015, n°13-17.229 ; Cass. Soc., 7 mars 2012, n°10-18.118 ; Cass. Soc., 26 novembre 2002, n°00-41.633).

L’indemnité compensatrice est calculée en fonction du poste occupé par le salarié avant qu’il ne soit déclaré inapte (Cass. Soc., 6 février 2008, n°06-44.898). Par exemple, si l’intéressé était employé à temps complet, l’indemnité ne peut pas être réduite en fonction du temps partiel préconisé par le médecin du travail.

Si l’employeur ne prouve pas la durée de travail convenue, le temps partiel est réputé à temps plein

Les juges ne peuvent pas rejeter la demande de requalification d’un contrat à temps partiel en contrat à temps plein si l’employeur ne démontre pas la durée exacte, hebdomadaire ou mensuelle, du travail convenue (Cass. Soc., 19 février 2014, n°12-26.430).

En l’absence de contrat de travail à temps partiel écrit mentionnant la durée du travail et sa répartition entre les jours de la semaine et les semaines du mois, comme l’exige l’article L 3123-14 du Code du travail, l’emploi est présumé à temps complet.

Pour contester efficacement cette présomption, l’employeur doit rapporter la preuve, d’une part, de la durée exacte hebdomadaire ou mensuelle convenue et, d’autre part, de ce que le salarié n’était pas placé dans l’impossibilité de prévoir à quel rythme il devait travailler et qu’il ne devait pas se tenir constamment à la disposition de l’employeur (par exemple : Cass. soc. 21 mars 2012 n° 10-21.542 ; Cass. soc. 9 janvier 2013 n° 11-16.433).

Dès lors, même si les bulletins de paie du salarié mentionnent l’existence d’un temps partiel, cette preuve est insuffisante à démontrer la durée exacte du travail, comme le prévoit l’article L. 3123-14 du Code du travail.

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